Petite autobio légère et dure à la fois. Beaucoup mieux que son premier bouquin : le format roman lui réussit. Ce n'est pas très profond ni ambitieux, mais le style est impeccable. L'impression de lire un Pagnol avec l'écriture de Bukowski. Daryl ne se romantise pas : il révèle ses côtés les plus méprisables. Ca fait du bien, dans une époque où nous nous montrons tous comme des héros de vertu ou des victimes.
Le roman traite les thèmes habituels de l'adolescence : les relations familiales, la bande de potes, la découverte de la sexualité, le besoin de prouver quelque chose. Mais cette fois, c'est dans le contexte spécifique d'un collège rural à la fin des années 2000, pendant l'émergence des réseaux sociaux, juste avant qu'ils se généralisent et se banalisent. Nous assistons au dernier témoignage d'une jeunesse qui aura grandi sans réalité sociale virtuelle - ou bien le premier d'une jeunesse qui aura grandi avec : on se situe à l'époque charnière où cette transition s'est effectuée. On s'envoie des messages, on commence à montrer sa vie en vitrine sur Skyblog puis FB, on s'envoie des SMS quotidiennement, mais l'essentiel de la vie sociale se déroule encore en présentiel : vélo, scooter, bastons, mangas, sport, ciné, cartes, consoles etc.
Daryl fait renaître une époque, et c'est en ça qu'il est doué. C'est un bon auteur du contexte. Là où il est un peu plus faible, c'est dans le propos : cette quête de virilité. Le jeune Daryl veut prouver sa valeur, tous ses petits copains également, ça joue les grands, ça fait des conneries, ça franchit les barrières, c'est un peu ridicule et Daryl est le premier à se moquer de ces ados, lui inclus. Mais à part ça, il n'aborde pas beaucoup d'autres thèmes, et ça devient un peu redondant. Il décrit comment ils essaient de ne pas passer pour des salopes dans plusieurs situations différentes, un peu comme un philosophe qui prendrait une dizaine d'exemples pour illustrer une seule thèse. Heureusement que le roman est court, car ce n'était pas encore trop lassant au moment où ça s'arrête. D'ailleurs, la conclusion est parfaite, imprévisible mais logique.
Il est plutôt prometteur, surtout pour un premier roman. Daryl a du style, et c'est rare, il sait poser un cadre, un contexte, un rythme, l'immersion dans son univers est une réussite. Il lui manque peut-être encore cette subtilité, cette richesse dans le regard, cette vision sur le monde, cette originalité non pas strictement formelle mais intuitive. Pour une autre fois ?