Non pas que la misère serait moins pénible au soleil, comme le chantait Aznavour, mais la littérature a le privilège de lui donner d'autres couleurs, plus supportables, peut-être pas, mais poétiques sinon, à condition d'avoir le talent d'évocation et le style de Giosué Calaciura. C'est sous la forme d'un conte, empreint de réalisme magique que l'écrivain sicilien narre la vie d'un quartier palermitain et d'une poignée de personnages, dans Borgo Vecchio. Une confluence d'intrigues intemporelles, la période aurait pu être celle de l'immédiat après-guerre, dans lesquelles s'inscrivent des tragédies en gestation, lesquelles se concrétiseront dans le final de Borgo Vecchio, comme un feu d'artifice sacrificiel et dramatique au possible. La plume de Calaciura est plus lyrique que néo-réaliste, teintée d'humour, et la question peut se poser : ne retient-on pas surtout la grâce de l'écriture qui, en quelque sorte, sublime la pauvreté et glorifie les actes délictueux en les expliquant par la pure nécessité de la survie ? Il y a un véritable "plaisir" à lire les mésaventures des pauvres héros du livre qui est paradoxal dans cet univers qui autrement décrit aurait pu ressembler à celui d'Affreux, sales et méchants de Scola. C'est là, sans doute, où réside l'intelligence d'un romancier qui joue sur ces apparentes contradictions, certain qu'il est de susciter à la fois le malaise et le bonheur dans un maelström de sentiments. Il a pour sûr évité le misérabilisme et cette évocation d'un quartier déshérité de Palerme, avec ses protagonistes hautement romanesques, est une manière assez admirable de transcender et de témoigner à la fois de la désespérance de la condition humaine.

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le 14 août 2019

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