Capitaine Massacrabord par Le_bibliophage
Il y a quelque temps, j'ai découvert un superbe livre de Mervyn Peake. Le genre de livre qui marque tant le graphisme et le ton sont à la fois étrange et séduisant. C'est un livre assez ancien, de 1939, réédité il y a peu par les éditions La joie de lire. La première chose qui marque c'est son dessin, on voit tout de suite qu'il n'est pas un auteur contemporain. Il y a dans son trait quelque chose qui évoque les planches académiques d'études de la faune et la flore. Le genre de dessin à la fois figé et hyper réaliste, comme on pouvait encore en voir dans les écoles ou les vieilles encyclopédies.
On sent son intérêt pour la morphologie, à travers les personnages ou animaux dont il déforme les corps pour mieux exprimer leurs caractères. Il invente une faune de chimères à l’aspect quelque peu grotesque et effrayant, qui m'évoque ces jeux où il fallait identifier les différents animaux constituant un ensemble chimérique. À travers une technique à base de points et de hachures, Peake parviens à donner des effets de matière très saisissants. Les planches de dessins de jungle sont vraiment très belles. Il a un dessin peu évident, au vu des standards des livres jeunesses actuels, mais tellement rafraîchissant et idéal pour habituer les mômes à un peu plus de diversité.
Le second aspect appréciable est l'histoire, dont la narration échappe à la structure classique. Le rythme du récit est lent par moments, très descriptif, puis d'un coup devient très elliptique. La fin ouverte est peu conventionnelle. Le personnage principal du capitaine pirate évolue certes vers une sorte de sérénité, mais c'est seulement lorsqu'il a perdu tous ses semblables, qu'il s'ouvre à une nouvelle forme de vie. Tout cela pour vous dire que ce livre, assez surprenant, est de ceux qui marquent longtemps. Je ne serais trop que vous en recommander la lecture.