Un été en équation

À seize ans, l’été 1976, Anne navigue entre l’ennui des journées interminables et l’électricité des « premières fois ». Dans ce récit autobiographique, l’autrice revisite l’intimité de ses pensées adolescentes : les rêveries, le désir, l’ennui, le besoin de s’affranchir. Entre les codes du monde adulte et la quête d’une identité propre, cette adolescence devient un champ de bataille intérieur.

Les personnages :

- Anne est l’héroïne-narratrice, fragile et lucide, oscillant entre observation et désir.

- Autour d’elle : sa famille silencieuse, rigide, comme figée dans un confort immobile. Et Mathieu, compagnon d’élan, voix alternative dans un monde qui s’éveille.

- Ce sont surtout les "autres", adultes, parents, figures figées qui incarnent les murs contre lesquels l’adolescente bute.

Le récit de Annie Ernaux est d’une justesse frappante : chaque sensation, chaque attente, chaque regard contient à la fois toute la vie et toute l’appréhension. J’ai apprécié ce mélange d’abandon et de conscience aiguë, cette adolescente-consciente qui note ce qu’elle vit.

Pour autant, la forme, un soliloque intérieur quasi ininterrompu, m’a paru pesante à certains moments. Le flux incessant de pensées et de critiques sociales manque parfois de distance, d’espace respirable. Il y a une forme de jugement sans appel, qui rend l’écriture belle, mais parfois distante.

Cela dit, le désir de littérature, de questionnement, de rupture avec le monde établi, traverse le livre comme une flamme. Et ce goût de l’émancipation rend le tout vibrant, même si la forme exigeante demande au lecteur un peu de lâcher-prise.

"Ce qu'ils disent ou rien" est donc un voyage en profondeur dans l’être qui se cherche, qui veut et qui craint à la fois. Ce livre n’est pas une fugue légère : c’est une exploration, parfois ardue, d’un moi en construction.

Si je n’ai pas toujours adhéré à la densité formelle, j’ai été touchée par l’honnêteté de la voix, par ce souffle adolescent qui veut dire son désir d’être et de durer. Une lecture à savourer, peut-être plus qu’à lâcher.