Qui sommes-nous ? semblerait nous dire l'auteur
"d’aussi loin qu’il se souvenait, il était fasciné par la répétition par la façon qu’ont les êtres humains de raconter les mêmes histoires sur leur propre compte, encore et encore (…). La répétition est une façon simple et non invasive de la procédure."


L’utilisation d’un nouveau corps comme réceptacle de la conscience.
Le corps comme seul moyen de survie à la maladie ou à la vieillesse.
L’immortalité, le rêve de l’homme...
La Procédure Malevine vise la linguistique comme base à la réussite.
Un individu ayant subi un encodage est dans un premier temps incapable de parler. La conscience humaine, précédée et construite par le langage lui-même…où seul celui-ci justifierait de sa réalité. Nous ne sommes que des mots peut résumer ainsi la procédure. Dupliquer et définir l’existence d’un homme par ses propres écrits (pour le "cas" Johnson).


Un homme qui dit être Nicholas Slopen est interné dans un hôpital psychiatrique. Il aura d’autant plus de mal à se faire entendre, que Nicholas Slopen, est mort et que son corps n’est plus tout à fait le même. Mais les détails qu’il donnera de sa vie passée étant pour le moins vérifiables, le doute s’installe.
Universitaire spécialiste de Samuel Johnson, - écrivain anglais du XVIIIe siècle, critique littéraire reconnu de Shakespeare, et auteur de son fameux dictionnaire de la langue anglaise- Nicholas devait, pour le compte d’un mystérieux personnage valider la conformité de lettres de l’auteur. Problème, les écrits semblent récents…impossible donc que l’auteur ait pu les écrire. Supercherie qui plongera Slopen dans un complot aux multiples ramifications.


Avec Au nord du monde Marcel Théroux surfait sur l’anticipation avec un western apocalyptique, pour un sursaut de vie face à la destruction, dans Jeux de pistes, et avec nostalgie, il pointait la mémoire et ce qui «était perdu» pour se défaire d’une vie désespérante.
Corps variables, c’est le rapport à la conscience humaine pour mettre en abîme la notion de notre réalité propre. Mais si les deux ouvrages sont d’une parfaite fluidité Corps variables opte pour une écriture plus alambiquée, mélangeant les temporalités et les écrits, au sein de même chapitre, pas toujours judicieux en terme de lisibilité.
Marcel Théroux opte pour le cheminement de l’homme à travers l’histoire d’un autre, sa mémoire pour l’appropriation d’une vie non vécue, et questionne l’identité humaine par plusieurs niveaux de réalité, via les les notes du narrateur, les mémoires de Nicholas Slopen (son testament), les notes du psychiatre et celles de la narratrice qui ouvre l’intrigue.
Le mystère entoure l’homme...et lui-même.
De multiples personnages mystérieux croiseront le chemin de Slopen, un idiot et des savants russes, une femme mystérieuse, pour autant de pistes à notre compréhension.


Anecdotique la question de l'éthique ou l'idée de ce programme expérimental initié par des savants soviétiques, né des affrontements de la guerre froide.
Plutôt l'occasion pour l’auteur avec ses apartés de proposer le rapport à subtilité de la langue et à la littérature. On retrouve ici encore l’aventure, plutôt que l’étude scientifique ou métaphysique (que laissait présager le sujet) et on rejoint la construction des deux précédents ouvrages.


Un thriller d’anticipation, ponctué de réalisme, de psychologie, d’introspection du double, déroulant son intrigue qui deviendra de plus en plus personnelle et mélancolique interrogeant l’homme sur sa vie et ses erreurs, à mesure que l’aventure le mènera à la confrontation avec son original.

limma
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le 4 mai 2018

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