Quel goût on les sandwichs que mange le commissaire Maigret et le lembas que mangent les personnages du Seigneur des anneaux ? Quelle est l’odeur du Barbouze de Fior, le parfum de Gabriel dans Zazie dans le métro, et du buffet de gare de Si par une nuit d’hiver un voyageur ? Qu’est-ce diable que ce fulmicoton que les héros du Voyage au centre de la Terre emportent dans leur bagage ?
Autant de petits et grands mystères qui cristallisent quelque chose du pouvoir d’absorption des romans et de notre désir de projection dans des réalités si étrangères à la nôtre. En une vingtaine de courts chapitres, Clémentine Mélois explore quelques uns de ses souvenirs de lecture les plus décisifs pour tenter de cerner ce qui donne sa saveur particulière à ce loisir capable de nous abstraite de toutes les tempêtes qui font rage au dehors. Avec une bonne dose de bovarysme et un certain penchant fétichiste pour l’objet-livre (deux tendances que je ne partage pas ou plus tellement, sans que cela m’ait tenu à distance du propos général), Clémentine Mélois signe un petit livre chaleureux et savoureux, qui n’a pas d’autre prétention que de mettre en partage les plaisirs habituellement solitaires de la lecture mais qui, à la manière d’un Pierre Bayard plus pop, éclaire intelligemment certains aspects de notre attachement aux livres.