Sans doute faut-il plus qu'une petite tendance au masochisme pour lire un livre comme "Des Noeuds d'Acier", qui, comme le "Misery" de Stephen King auquel on le compare généralement, appartient au genre quand même assez limité (et claustrophobe) des "captivity thrillers"... Parce qu'on se saurait parler de plaisir le long de ces - pourtant courtes - deux cents et quelques pages de torture physique et mentale, d'humiliation et de dégradation extrêmes. Très bien écrit - ou tout au moins bien mieux écrit que 90% des polars qu'on ingurgite généralement - "des Noeuds d'acier" se dévore en quelques heures avec ce mélange de fascination et de répulsion qui en fait un ouvrage marquant.
S'il a une qualité indiscutable, c'est son refus des concessions, sa détermination à nous éprouver jusqu'au bout, jusqu'à ces quelques pages de conclusion parfaites qui font littéralement saigner le coeur du lecteur. S'il a un défaut, c'est certainement un manque de "sous texte", de profondeur peut être, à la différence de "Misery", justement, qui doublait l'épreuve d'une jolie réflexion sur la création : Collette essaie bien dans la dernière partie du livre de créer un écho entre les frères monstrueux et la relation destructrice entre le "héros" et son frère, mais jamais ne nous convainc vraiment. L'énigme du comportement violent, déséquilibré, du personnage principal dans la toute première partie du livre se verra ainsi expliquée par le manque d'amour familial, mais ce thème lui-même reste assez superficiel, malheureusement.
Finalement, c'est en nous faisant réfléchir - involontairement sans doute - sur l'inhumanité de l'esclavage que "des Noeuds d'acier" risque le plus de rester dans nos mémoires, au delà de l'extrême inconfort que sa lecture aura engendré en nous.