Parfois l’on s’interroge à savoir comment on a pu faire l’impasse sur un livre. C’est le cas de celui-ci. Un sujet qui a tout pour me plaire, un auteur qui signait là avec fracas son premier livre, une aura sentimentale émouvante émanant du sujet quand les amis en parlaient… Il m’aura fallu attendre 13 ans pour m’y mettre. Regrets et remords. Car « En l’absence des hommes » est vraisemblablement l’un des plus beaux livres qu’il m’ait été donné de lire. Par sa construction en trois parties d’abord qui semblent briser une unité, mais qui en fait participent à la progression du récit, à l’évolution du jeune Vincent. Qu’il s’agisse de sa rencontre avec Marcel Proust ou de cette folle passion avec Arthur la première partie fourmille d’incroyables détails, de sentiments forts exprimés, d’interrogations et de questionnement sur ce qu’est l’amour sous toutes ses formes. Celui qui va de la passion à la compassion, pudique ou téméraire, platonique ou enflammé. Besson y met beaucoup son âme pour appréhender toutes ces formes, toutes ses phases. Il dépeint également à travers ses trois personnages une société qui évolue entre l’homme du passé (Proust), celui du présent (Arthur) et le passage de relai qui se fait ainsi naturellement par Vincent, l’adolescent à l’arrogante candeur qui peu à peu découvre la vie dans ce qu’elle a de plus merveilleux, mais aussi de plus cruel. Que dire d’autre sur la seconde partie, sous forme épistolaire, qu’elle concentre les plus belles Lettres, les plus beaux gages de cet indicible attachement qui relie ces trois hommes. Et la jalousie nous prend de n’avoir pas ce talent pour exprimer nos sentiments. Quant à la troisième partie, la plus glaçante et poignante, elle lancera Vincent sur la route de la vie, en l’absence de ces hommes peut-être, mais avec cet incroyable détermination à vivre au plus fort, au mieux, n’oubliant jamais les deux astres, l’un ascendant et l’autre descendant, qui en si peu de temps l’ont aidé à devenir à son tour un homme. Philippe Besson est habité par son récit, il y apporte toute la délicatesse, la cruauté, la violence et la passion extraordinaires. Son roman résonne à nos oreilles comme une symphonie de Mahler. Il s’en dégage une profonde tristesse, une nostalgie, masquées par l’espoir et la force qui réside en chacun de nous face à la plus grande des adversités ou aux plus horribles douleurs. « En l’absence des hommes » est un roman magnifique, raffiné et incroyablement bouleversant.
Fritz_Langueur
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le 10 déc. 2014

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