Cet étonnant roman se lit comme le manuscrit que Korim, héros et archiviste sans prétention, débusque un beau jour et dont le contenu se révèle si bouleversant que le mélancolique hongrois décide d'en extraire la substantifique sagesse afin de la traduire patiemment, puis de la diffuser au monde entier, et ce depuis New-York qu'il considère comme étant le centre névralgique du monde, car ce manuscrit est un joyau spirituel sans précédent qui retrace la quête mystique de quatre personnages curieux, Kacer et ses compagnons, à travers la Crête, Venise et Rome, à une époque lointaine, dont les pérégrinations se soldent par le constat accablant du mal lancinant qui ronge les homes et menace des société de destruction, dont le message de défaite du bien face au règne de la violence et de terreur fait douloureusement écho à nos jours d'aujourd'hui et dont la tristesse se dépeint entièrement sur Korim qui laisse peu à peu l'univers de ce manuscrit prendre possession de lui et l'aspirer vers une réflexion extrêmement complexe, lettrée et triste surtout, réflexion qu'il ne peut s’empêcher de faire partager à autrui, ce qui l'emmène à tenir des logorrhées passionnées à des interlocuteurs plus ou moins stables, en des lieux souvent saugrenus et de la façon la plus pulsionnelle qui soit, rendant la lecture du récit très dense, chaotique même, car l'auteur s'amuse à passer de l'histoire comptée à celle vécue, de jouer entre réel et imaginaire, de nous noyer sous des détails flottants, bref de brouiller les pistes et de rendre l'appréhension de cet ouvrage ingénieusement bordélique mais surtout très charmant, d'autant pus que le style est poétique et touchant, plein d'amertumes mais pas plombant non plus, assurément exigeant aussi car à l'instar de cette critique illisible, László Krasznahorkai n’écrit qu'une unique et longue phrase par paragraphe, ce qui fait qu'au final ce roman tend à se lire réellement comme le manuscrit de Korim, de manière plaisante, rude, hallucinée.