Un nouveau Stephen King, c’est toujours un mini événement dans le monde des livres. Sorti il y a deux mois dans l’hexagone, il est déjà l’objet de plusieurs critiques littéraires, pour beaucoup positives (il a déjà reçu un prix comme meilleur livre de l’année 2023). Ce roman a toutefois quelques particularités par rapport à la production habituelle du King.

D’abord, c’est un thriller, pas du fantastique, mais l’avant-dernier l’était aussi (Billy Summers), et c’est un genre que l’auteur a toujours investi, souvent sous un autre nom. L’horreur est au rendez-vous quand même…

On connaît les méchants et leurs motivations dès le début du livre. L’intrigue consistant à savoir comment ça va finir.

J’ai presque tout lu de Stephen King, mais là, j’ai eu du mal à reconnaître son écriture, son style…Même si on retrouve quelques personnages croisés dans Mr Mercedes.

L’intrigue se déroulant en pleine épidémie COVID, ce dernier est omniprésent, les personnages se rencontrant pour la première fois, devant montrer patte blanche en indiquant quels vaccins ils ont utilisé. Cela donne quelques scènes comiques. Et nous replonge dans l’absurdité de cette époque ; par exemple, Holly, le personnage principal vient d’assister aux obsèques de sa mère par Zoom…

A propos du COVID, celles et ceux qui étaient réfractaires aux vaccins et qui voudraient lire ce roman seront sûrement agacés par le ton moralisateur qu’adopte le King (qui pourtant fait plutôt dans la transgression d’habitude). Et en fin d’ouvrage, il assume cette position.

S’il s’agit bien d’horreur, le lecteur trouvera tout de même dans ce texte une parabole politique. S.King a toujours été à gauche, il ne s’en est jamais caché. Mais vire-t-il au wokisme dans Holly ? Certains critiques le pensent. Une bavure policière façon George Floyd rythme le récit ; et Stephen King de nous dépeindre la peur légitime de risquer se faire tuer pour rien lors d’un contrôle de police banal quand on est Noir. Ca c’est pour l’institution blanche, bien soutenue par la haine raciste qui anime nos deux vieillards cannibales.

Et à propos de vieillards, le King ne ferait-il pas un parallèle avec les deux autres qui s’affrontent politiquement ? Biden et Trump qui arrivent tous les deux à 80 ans ? Avec ses trous de mémoire, le Professeur Harris peut évoquer Biden ; quant à sa femme, raciste et sociopathe au dernier degré, elle fait bien évidemment penser à Trump. Pourquoi les représenter dans un couple ? Parce quoi qu’ils fassent, l’Amérique n’a rien à attendre de l’un ou l’autre de ses vieillards. Hors c’est à la jeunesse et aux minorités que s’en prennent nos cannibales ; une évocation à peine voilée du grand foutoir qu’est devenue la démocratie américaine, ou ce qu’il en reste. Stephen King, au-delà du fantastique et de l’horreur a toujours eu en seconde intention une critique de l’Amérique. Holly n’y échappe pas, mais c’est la première fois qu’il critique son pays aussi directement.

Au final, même si pour moi ce n’est pas le meilleur Stephen King, ça reste un bon thriller qui se lit en quelques soirées tardives et qu’on a hâte de retrouver en rentrant sous les draps… Décidément, le King est toujours là, et malgré ses 76 ans, il n’a rien perdu de sa verve.


Kerven
7
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le 29 avr. 2024

Critique lue 33 fois

Kerven

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