Illuminations
8.2
Illuminations

livre de Arthur Rimbaud (1886)

"Le pavillon en viande saignante sur la soie des mers et des fleurs arctiques ; (elles n’existent pas.)"
Barbare

Dans certaines situations les mots ne peuvent retransmettre ne serait-ce que la plus infime partie de ce qu'on ressent. Alors soit on se sent seul, soit on se sent en harmonie avec l'infini.
Ma lecture de tes Illuminations a complètement dépassé le cadre du livre, pour s'imprégner intégralement dans mon monde réel, établissant des connexions entre tous ses éléments...
Je ne devrais pas "critiquer" ce qui sort du plus profond de ton esprit, car tu as traversé des contrées si lointaines dont j'ignore totalement l'existence. Alors qui suis-je pour te donner une "note" ?
Je ne suis qu'un simple étranger qui voit au loin ton navire partir toujours, toujours plus loin.
Mais justice doit être faite malgré tout à ton génie.
Je n'y connais pas grand chose en poésie. Donc je peux dire que la façon dont tu utilises les mots pour créer un ensemble harmonieux est magistrale, mais je serais totalement incapable de comprendre comment tu y es parvenu, quels codes tu as rompu, etc. Et c'est tant mieux, ça me permet de mieux plonger la tête la première dans ton monde qui ne peut pas, je pense, s'expliquer au final.


Vendredi soir, fin de semaine.

Station République, ligne 8.
Je lis un de tes poèmes, complètement inconscient de ce qui est en train de se produire : "Il est l'affection et l'avenir, la force et l'amour que nous, debout dans les rages et les ennuis, nous voyons passer dans le ciel de tempête et les drapeaux d'extase."
Entre chaque ligne, mon esprit se remplit de pensées partant dans tous les sens, un peu comme à la lecture de chacun de tes poèmes. J'observe les autres passagers. Chaque bruit, chaque expression de visage, chaque vibration, sont en corrélation avec la forme et le fond de tes mots. Ton génie est déjà là, présent parmi nous dans ce métro. Mais je ne m'en rends pas bien compte encore, je ne sens que sa présence diffuse. Ma lecture de ce poème s'étire, je dois changer de ligne.

Invalides, ligne 13.
Un musicien de métro est déjà là, il souffle dans son saxophone et chante. Je l'ignore d'abord et me replonge dans ma lecture passionnée. Mais ma lecture et la musique progressent ensemble. Et plus elles progressent, plus ton génie refait surface. Je quitte de nouveau ma lecture. Le son du saxophone. Il est beau. Le musicien ne s'arrête pas, il aime ce qu'il fait, il sourit et veut nous partager cet amour. Mais nous ne le recevons pas et l'ignorons, parfois contre notre gré. Il fait la manche et ne récolte que deux pièces. Mais il continue de sourire, totalement indifférent face à sa situation "précaire" et face à notre mentalité condescendante. Alors il se remet à chanter, sa musique ramenant de nouveau le bonheur dans cet environnement morose. Il descend.
Je n'ai pas très bien saisi le sens de cette scène mais mon coeur est déjà rempli. Je me replonge lentement dans ton poème.

Je tourne la page.
Je me rends compte qu'il s'agit là du dernier poème de ton recueil.
Je relève mes yeux vers le musicien sur le quai. Toujours le sourire aux lèvres, il continue de jouer.
C'en est trop. Une larme coule. Ton génie est là, devant mes yeux. Il est là dans tes mots. Il est là dans son sourire. Il est omniprésent ici et maintenant. Et ENFIN j'arrive à l'apercevoir de très loin, sous cette forme totalement abstraite. Les portes se referment et je lis tes derniers vers. Et chaque mot me donne un violent coup de fouet.
Tu résumes là parfaitement tout ce que tu m'as appris durant l'éprouvante lecture de ce recueil : Du Déluge à Jeunesse, en passant par les Ponts ou le Métropolitain, ton Génie conclut magistralement tes Illuminations.
Je referme le livre, une joie intense est mêlée d'une nostalgie imminente. Je descends du wagon et remonte à la surface.

Tu m'as ouvert les portes d'un nouveau monde, que je ne connaissais qu'en théorie, que dans mes rêves, que dans mes pensées.
Tu m'as prouvé qu'il existait.
Tu m'as prouvé que le monde rationnel peut être transcendé, que le monde inconnu et immense de notre esprit et de l'univers ne tiennent au final qu'à nous mêmes. Ainsi, nos possibilités sont infinies.
Tu m'as tout simplement libéré d'un poids que je portais depuis bien trop longtemps.
Tu m'as donné envie de vivre mes rêves et de rêver toute ma vie.
Tu m'as montré le beau à travers un angle complètement nouveau.

Devant tant de perfection, tu m'as convaincu d'explorer ce nouveau monde et de marcher sur tes traces.
Tu m'as véritablement rendu amoureux de l'art, et ainsi tu as comblé un manque terrible que je pensais pourtant avoir déjà rempli.
Tu me remets constamment à ma place et me rappelle que je ne suis qu'un simple être humain, qui ignore absolument tout de la vie.

A travers la puissance infinie de chacun de tes mots, tu partages tes illuminations.
Et je t'en remercie du fond du coeur.
Enfin, je me sens illuminé.

"Un rayon blanc, tombant du ciel, anéantit cette comédie." Les Ponts
yaya-dc
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le 8 févr. 2014

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