Sortie en 2016 en Italie, l'autobiographie de Enzo G. Castellari est désormais disponible en France grâce à l'excellente initiative du jeune éditeur Rififi. L'occasion rêvée de revivre la carrière de l'un des plus grands artisans du Bis italien, capable aussi bien de nous concocter de véritables petits chefs d'œuvre (Keoma, Big Racket, Le Témoin à abattre...)...que des « nanars » désargentés devenus totalement cultes (Les Guerriers du Bronx, La Mort au large...).


Longtemps dénigré, moqué et devenu introuvable au fil du temps, le Bis italien s'est refait une véritable jeunesse grâce notamment à certains éditeurs vidéo comme Artus, Le chat qui Fume, The Ecstasy of Films ou plus récemment les petits nouveaux de Frenezy qui ont multiplié les sorties de ces bobines ces dernières années. Parmi les maîtres du film de genre, Enzo Castellari n'est pas en reste non plus avec les sorties récentes du Témoin à abattre, Keoma et à la rentrée celles des Guerriers du Bronx 1 et 2, des Nouveaux barbares et enfin d'Un citoyen se rebelle. Et cerise sur le gâteau, son autobiographie, Inglorious Bâtard, vient de paraître en version française chez le jeune éditeur, Rififi.
Cette petite maison d'édition, chapeautée par Steve Bellentani, traducteur en italien, née en 2021 avait déjà frappé fort avec la sortie de Mad Max : ultraviolence de Malvin Zed qui a justement réalisé la superbe fresque qui illustre la couverture de l'ouvrage de Castellari. Dans ce pavé orné de nombreuses photos personnelles du cinéaste, celui-ci nous raconte ses nombreux souvenirs et anecdotes savoureuses d'une longue carrière démarrée officiellement en 1966 à seulement 28 ans, avec Quelques dollars pour Django où il avait remplacé au pied levé le réalisateur espagnol Leon Klimowski en cours de tournage.


UNE AFFAIRE DE FAMILLE


Fils du « stakhanoviste » Marino Girolami (qui réalisa et scénarisa plus de 80 films), Enzo et son frère acteur Ennio Girolami ont dès leur plus jeune âge baigné dans l'univers du cinéma en suivant leur père sur les tournages. Malgré des études d'architecture, le jeune Enzo se passionne pour le septième art et devient au fil des années un collaborateur de son père, parfois figurant, se passionnant pour le montage et les acteurs. Décrite comme une période de rêve, cette jeunesse passée dans les coulisses lui permettront aussi de rencontrer sa future femme ! Le cinéma chez les Castellari est donc une véritable histoire de famille, si on ajoute le réalisateur Romolo Guerrieri, oncle d'Enzo, son fils Andrea devenu assistant-réalisateur, ou encore sa fille Stefania Girolami et son cousin Massimo Vanni, présents dans nombre de ses films...
La carrière de Castellari est également une longue histoire d'amitiés, notamment avec l'acteur Franco Nero, qui signe d'ailleurs la préface du livre. Le duo s'est ainsi réuni à neuf reprises, enchaînant , presque, à chaque fois les succès au Box-Office comme avec les polars Le Témoin à abattre et Le Citoyen se rebelle ou les westerns Keoma et Jonathan des ours.
Parmi ses collaborateurs réguliers, on retrouve de nombreux hommes de l'ombre que le cinéaste remet en lumière. Ainsi les apports du monteur Gianfranco Amicucci (avec lequel il montait chaque soir les séquences tournées le jour même, permettant au film d'être prêt à être présenté dès la fin du tournage), du maquettiste Emilio Ruiz qui par son talent et ses ruses permit de passer outre des budgets modestes ou encore du scénariste Tito Carpi, « mon plus précieux collaborateur et mon meilleur ami », furent essentiels à un réalisateur reconnu pour sa débrouillardise et sa rapidité d'action.


POUR LE MEILLEUR... ET POUR LE PIRE


A l'image de la plupart de ses collègues réalisateurs du Bis italien, les années 1980 marquèrent un certain déclin de la filmographie du cinéaste-cinéphile. Alors que les années 1960-1970 accouchèrent de véritables pépites qui influencèrent d'autres réalisateurs dont Tarantino avec son Inglorious Basterds (faux-remake d'Une Poignée de salopards sorti en 1977), ses œuvres postérieures sont de nos jours plutôt considérées, au mieux, comme de délicieux « nanars » et figurent en bonne place au palmarès de nos confrères de Nanarland !
Une période que Castellari assume totalement, rappelant que son remake des Dents de la mer, La Mort au large, fut un carton aux Etats-Unis...avant d'y être interdit pour plagiat. Le post-apo Les Guerriers du Bronx attira aussi les foules mais tout comme ses deux autres contributions au genre (Les Guerriers du Bronx 2 et Les Nouveaux barbares), elles sont surtout marquées par la faiblesses des acteurs (Mark Gregory en tête, que Castellari avait trouvé dans une salle de sport...) et un côté kitsch ayant mal traversé les décennies. Si on ajoute le ratage Sinbad, en collaboration avec Golan & Globus qui se retirèrent en cours de tournage, avec le culturiste Lou Ferringo en vedette, le bourrin Striker, seul film que Castellari ne signa pas de son vrai nom, ou Laser killer, avec un Erik Estrada échappé de la série Chips, cette période est marquée par une baisse des ressources financières qui obligea Castellari à se débrouiller encore et toujours avec le peu de moyens mis à sa disposition.


Toujours enclin à raconter ses souvenirs aux fans ou à partager son savoir-faire aux futurs cinéastes, Enzo Castellari a finalement à 70 ans connu une nouvelle jeunesse avec la sortie de Inglorious Basterds et l'hommage de Tarantino qui ont permis à toute une génération de redécouvrir une carrière spectaculaire qui ne cesse d'être réévaluée. Saluons donc l'initiative de l'éditeur Rififi avec la sortie de ce livre indispensable pour les amoureux du Bis italien !

SB17
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le 9 déc. 2022

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