Il est clair que Jean Loïc Le Quellec n'a pas lu Jung, n'a pas parcouru son œuvre pour réaliser sa critique. C'est bien dommage, car, ses travaux de préhistorien sur l'origine des mythes (tous comme ceux de Julien Huy) ne s'opposent pas à la pensée de Jung, car ce dernier n'a jamais réduit son discours à quelques archétypes qu'il aurait figé, contrairement à ce que dit ce livre. Je pense même que Jung aurait applaudit aux recherches de Le Quellec. Rien n'a jamais été figé dans la pensée du psychiatre. Rien n'a jamais été dogmatisé, contrairement à Freud (il suffit de voir les dégats qu'ont fait ses certitudes sur la sexualité des femmes). Jung disait de lui-même que, quiconque voulait poursuivre ses travaux devrait s'opposer à lui. En revanche, la critique de Le Quellec frappe peut-être des aficionados de la pensée jungienne qui eux-mêmes ne la maîtrisent pas plus, sinon de manière superficielle et dans la plus totale des confusions, alliant pseudo-science et ésotérisme. Jung était un scientifique et un phénoménologue. Freud non. Je m'étonne qu'un chercheur du CNRS ait mis tant d'énergie à tacler un domaine sur lequel il n'est pas compétent.
La suite de ma critique n'est pas de moi, mais vient de ma recherche des réactions des psychanalystes jungiens. Si vous souhaitez continuer pour plus d'éclaircissement, voici quelques pistes.
Les psychanalystes jungiens peuvent émettre plusieurs objections face au livre de Jean-Loïc Le Quellec "Jung et les archétypes. Un mythe contemporain" en raison de certaines critiques que l'auteur formule à l'encontre de Carl Gustav Jung et de sa théorie des archétypes. Voici quelques arguments que les psychanalystes jungiens pourraient opposer :
1. Réductionnisme et simplification des concepts
Le Quellec critique parfois la notion d'archétype telle que définie par Jung, en soulignant que cette approche peut sembler trop abstraite ou même réductrice dans la manière dont elle réduit les archétypes à des catégories rigides et universelles. Les psychanalystes jungiens, au contraire, insisteraient sur la flexibilité et la fluidité des archétypes, qui ne sont pas des entités fixes mais des structures dynamiques de l'inconscient collectif. Pour eux, les archétypes ne sont pas de simples stéréotypes ou représentations universelles, mais des formes profondes qui se manifestent à travers des symboles et des images dans les rêves, les mythes et l'art.
2. Méconnaissance du travail de Jung sur les archétypes
Les psychanalystes jungiens pourraient reprocher à Le Quellec de mal interpréter ou de réduire la complexité du concept d'archétype chez Jung. Jung lui-même a souligné que les archétypes sont avant tout des structures primordiales qui se déploient dans des contextes spécifiques, en interaction avec le psychisme individuel et culturel. Certains critiques jungiens pourraient estimer que Le Quellec néglige l'aspect évolutif et contextuel des archétypes dans l'œuvre de Jung, en insistant trop sur une vision statique ou systématique.
3. Critique de la "mythologie" jungienne
Un des points que Le Quellec soulève dans son ouvrage est que la psychanalyse jungienne présente une vision trop mythologique et quasi religieuse de l'inconscient collectif et des archétypes. Certains psychanalystes jungiens pourraient rétorquer que cette critique déforme la pensée de Jung, qui n'a jamais présenté les archétypes comme des mythes au sens strict, mais comme des structures fondamentales de l'expérience humaine. En d'autres termes, les archétypes ne sont pas des "mythes" au sens où on les comprend dans les religions ou les narrations culturelles, mais des formes originelles de l'expérience humaine qui se manifestent sous diverses formes dans les individus et les cultures.
4. Méconnaissance de la diversité des archétypes
Le Quellec a tendance à critiquer la tendance à figer et réduire la notion d'archétype à des formes très déterminées (par exemple, l'archétype du "héros", de la "mère", de l'"ombre", etc.). Les psychanalystes jungiens, cependant, souligneraient que Jung n'a jamais limité les archétypes à quelques catégories prédéfinies. Au contraire, Jung a parlé de l’infinité de formes archétypiques possibles, en insistant sur le fait que ces archétypes sont des structures potentiellement infinies qui se manifestent de manière unique dans chaque individu et culture. Pour eux, réduire ces structures à une vision trop étroite serait une mauvaise interprétation de la flexibilité du concept jungien.
5. Conflit sur la méthodologie
Le Quellec adopte souvent une approche plus empirique et critique, tandis que la psychanalyse jungienne accorde une grande importance à l'expérience subjective, au symbolisme et à l'intuition (la méthode cartésienne n'étant pas suffisante pour saisir l'aléatoire de la psyché humaine, il s'était appuyé sur la philosophie d'Husserl, ordonnateur de la phénoménologie). Les psychanalystes jungiens pourraient critiquer Le Quellec pour ne pas avoir suffisamment pris en compte la manière dont l'expérience clinique, les rêves, les mythes et les images sont au cœur de l'analyse des archétypes, et pour négliger la dimension existentielle (donc phénoménologique) et thérapeutique de l'approche jungienne.
6. La question de l'inconscient collectif
Le Quellec remet parfois en question la notion d'inconscient collectif, qui est l'une des pierres angulaires de la pensée jungienne. Selon lui, l'inconscient collectif serait une construction théorique non vérifiable. Les psychanalystes jungiens rétorqueraient que, bien que l'inconscient collectif soit une notion difficile à prouver de manière empirique, elle reste extrêmement utile pour comprendre les structures fondamentales de l'esprit humain et leur manifestation dans les symboles, les rêves et les mythes. Ils souligneront aussi que Jung ne l’a jamais défini comme une "théorie" au sens strict, mais comme une hypothèse fonctionnelle pour comprendre les expériences humaines.
7. Jung et la spiritualité
Enfin, un autre point de friction pourrait être la critique de Jung par Le Quellec sur son approche de la spiritualité et des processus de transformation psychique. Jung a souvent évoqué la dimension spirituelle de la psychologie, et Le Quellec, parfois critique, peut y voir une déviation du discours scientifique. Pour un psychanalyste jungien, cette critique serait perçue comme une incompréhension de la relation complexe entre psyché et spiritualité que Jung tentait de décrire. Ils insisteraient sur le fait que la dimension spirituelle dans la pensée jungienne n'est pas une simple croyance religieuse, mais une réalité psychologique fondamentale dans le processus d'individuation. La fonction religieuse est une fonctions de la psyché. Et cela n'ouvre pas sur une quelconque spéculation sur l'existence ou non de divinité.
Conclusion.
En résumé, les psychanalystes jungiens pourraient opposer à Jean-Loïc Le Quellec une vision plus nuancée et dynamique de l'inconscient collectif et des archétypes, soulignant que ces concepts ne sont ni statiques ni réductibles à des clichés, mais qu'ils sont au contraire des structures profondes et évolutives, liées à des processus individuels et culturels spécifiques. De plus, ils pourraient critiquer la tendance de Le Quellec à simplifier ou à mal interpréter certains aspects de la théorie jungienne, notamment la relation entre les archétypes et la subjectivité humaine, ainsi que la dimension spirituelle de l'œuvre de Jung.