Incontournable Juillet 2022


Version courte:

Dans cet album qui tient aussi du roman, on se laisse attendrir par la beauté de ces relations entre personnage comme de ses illustrations. Et par le panorama aussi, ayant rarement des histoires se déroulant en Grèce. Maria, l'héroïne, est un personnage tranquille, qui ne fait pas de remous au début, mais qui se montre tenace sur les sujets réellement importants. Elle a une grande maturité et fait preuve de beaucoup de courage. Dans cette histoire qui traite de la maladie de Hansen ( La lèpre), il est bon de rappeler que la maladie fait doublement de ravage quand elle est marquée d'incompréhension et de fausses croyances. Ce n'est pas en rejetant qu'on s'en prémunie et ce n'est pas en niant que la solution va se manifester. Bref, une belle histoire, qui traite de tolérance, d'amour sincère, d'espoir et de l'importance de la démarche scientifique, adapté pour les 10 ans et plus.



Version exhaustive:



Voir un album jeunesse naitre d'un roman adulte est toujours une joie, car il peut être accessible aux plus jeunes. Après "La Tresse" ou "Les Glorieuses", me voici sur le cas de "L'Île de Maria", version album jeunesse de "L'Île des oubliés", de Victoria Hislop. L'album est un hybride, plus exactement, car il revêt le texte du roman, amalgamé aux illustrations et au format de l'album jeunesse typique.



Rita visite chaque été sa grand-mère Maria, en Crète ( En Grèce) et en observant des photographies, la jeune demoiselle interroge sa "giagia"( Grand-mère) sur sa famille. Lorsqu'elle évoque Plaka, son village d'enfance , Rita demande si elles peuvent d'y rendre. Une fois sur place, l’aïeule commence un récit, celui de son enfance, où au début du 20e siècle, une maladie commençait à se rependre dans le pays: La lèpre. Source d'inquiétude en raison de son absence de traitement et la nature même de la maladie, une autre composante s'ajoute à l'angoisse d'en être porteur/porteuse: Le rejet social. Vu comme une punition divine, une marque d'impureté, les habitants contaminés sont aussitôt envoyé des quatre coins de la Grèce sur l'île de l'autre côté de Plaka, Spilalonga. Mais la quarantaine imposé aux condamnés n'est pas la seule marque de la maladie. Les proches des malades sont aussi évités, comme si la honte frappait ceux qui avait le malheur d'être affiliés à des lépreux. La propre sœur de Maria, Anna, vaniteuse et égocentrique, n'a pas hésité à rompre le contact avec sa mère, puis sa soeur, pour cette raison. Maria voit en effet sa mère rejoindre Spilalonga, lorsqu'une tache insensibilisée est trouvée sur sa nuque, peu de temps après le meilleur ami de Maria, Dimitris. La femme et le jeune garçon quitteront d'ailleurs Plaka ensemble pour cette île qui rassemble les condamnés lépreux, pour qui, hélas, aucuns traitement ne peut les sauver. Mais après plusieurs années de correspondance entre mère et fille, Maria pleure sa mère, décédée des suite de la maladie. Peu de temps après, Maria est infectée à son tour et part pour l'île. Elle retrouve Dimitris, qui est entretemps devenu professeur de l'île et ensemble, se bâtisse une vie, sur cette île étonnamment magnifique et fonctionnelle. Les choses vont changer quand un médecin, non-lépreux, vient sur l'île avec l'intention de trouver une cure pour cette maladie.




Je précise ne pas avoir lu le roman qui est à l'origine de ce roman-album jeunesse. Cela-dit, l'histoire, même raccourcie et adoucie ( du moins je le présume) demeure pertinente, touchante et bien ficelée. On ne parle que très peu de la maladie dans ses symptômes, en réalité. On mentionne à peine deux ou trois fois que les gens perdent des membres, mais on ne perd pas de temps sur sa "laideur". L'accent est mit sur la famille, sur la correspondance entre deux îles si près et pourtant si loin, entre une petite fille qui cultive l'espoir et sa mère qui cultive la beauté de la vie. Une correspondance qui s'accompagne de dessins et de salutations de la mains et du châle, chaque matin. À travers la maladie, les deux côtés travaillent à garder contact et c'est ce qui est touchant. Alors que les autres gens détournent les yeux de ces malheureux qui ont été contaminés ( et non pas "maudits") Maria refuse cette attitude.



Maria, donc, va se retrouver sur l'île, c'est en quelque sorte le second volet de cette histoire. Optimiste infatigable et scientifique dans l'âme, elle tente de se faire une science par elle-même au moyen de manuels et de magazines scientifiques. Son objectif: trouver un moyen de guérir la maladie. Alors quand M.Kyritsis débarque un beau jour avec la même idée en tête, l'espoir connait un regain. Maria a fait de rigoureuses prises de données, a participer activement aux recherches du médecin et l'aura assisté durant les essais cliniques, en tant qu'assistante.



Dans l'histoire, M.Kyritsis ramène un traitement expérimental pour les patients et devant les pronostics peu encourageant, Maria se propose pour l'essai. Après des fièvres coriaces et beaucoup de faiblesse, la tache à son mollet a disparu. Elle est guérie. L'île pourra laisser ses patients reprendre leur vie, même si les préjugés à leur endroits vont certainement être un gros défis pour eux. Maria et le médecin auront entretemps développer une complicité qui s'est mue en affection et ensemble, auront parcouru le monde en tant que couple, afin d'aller guérir d'autres gens ayant la lèpre.



Petit fait historique: C'est la chimiste Alice Augusta Ball, première afro-américaine à faire une maîtrise de Chimie et c'est à elle que l'on doit le remède, même si l'homme qui a compléter ses recherches, à son décès prématuré, n'aura pas spécifié que le remède était le résultat du travail de mademoiselle Ball. Je joins plus bas le lien qui résulte de cette petite parenthèse.



Les illustrations sont douces, elles ont une palette de couleurs différentes selon l'époque. la palette du présent est vive, avec un bleu lavande à l'honneur. La palette du passé est dans les tons sépia, avec des ocres, des bruns, des noirs, des gris et du corail foncé. J'aime cette distinction, ça lui donne un cachet un peu "vintage". Le trait a un côté enfantin, comme des dessins d'enfants, mais avec une gravité d'adulte. Je pense que le crayon de bois côtoie l'aquarelle, l'un plus pour la texture et tracer les détail, l'autre pour le remplissage et l'ombre et lumière. C'est sobre et cela sert bien l'histoire. J'aime bien ces cadres qui suivent les pages avec des motifs lavande et corail, on dirait que le récit est suivi par de la broderie.



En somme, on se laisse attendrir par la beauté de ces relations entre personnage, que ce soit entre Maria et Dimitris, Maria et sa mère, Maria et son père. Et par le panorama aussi, j'ai rarement la chance d'une histoire se déroulant en Grèce. Maria est un personnage tranquille, qui ne fait pas de remous au début, mais qui se montre tenace sur les sujets réellement importants. Elle a une grande maturité et fait preuve de beaucoup de courage. En outre, il est bon de rappeler que la maladie fait doublement de ravage quand elle est marquée d'incompréhension et de fausses croyances. Ce n'est pas en rejetant qu'on s'en prémunie et ce n'est pas en niant que la solution va se manifester. Bref, une belle histoire, qui traite de tolérance, d'amour sincère, d'espoir et de l'importance de la démarche scientifique.



Pour un lectorat à partir du troisième cycle primaire, 10-12 ans.



Lien National Geographic : Alice Ball, la scientifique qui a découvert un traitement contre la lèpre, a failli tomber dans l'oubli : https://www.nationalgeographic.fr/sciences/alice-ball-la-scientifique-qui-a-decouvert-un-traitement-contre-la-lepre-a-failli-tomber-dans-loubli

Shaynning

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