La Chute
7.6
La Chute

livre de Albert Camus (1956)

Voici un livre brillant ! Pertinent et juste ! Si on peut user de ce dernier adjectif.

J'adore son style ! Ses mots dans ce livre sont un délice ! Et pourtant, je ne dirai pas pareil pour tous ses livres, j'ai eu beaucoup de mal avec plusieurs livres de Camus dont L'homme révolté, La mort heureuse, et Noces suivi de L'été.

Mais là, yummy ! Des sujets sérieux abordés avec un style délicieux. Une jolie métaphore entre le capitalisme et les piranhas, ou encore une jolie description de l'homme moderne il forniquait et lisait des journaux ! Vous l'aurez compris, une critique de la société avec beaucoup d'ironie !

Il s'est étonné qu'un juge puisse se désigner lui-même pour exercer cette fonction, c'est vrai que ce n'est pas très sensé, je n'y avais jamais pensé pourtant. C'est malin comment la justice a été enlevée au sage du village pour en faire un business comme les autres... allez, presque !

On n'a fait que tout pourrir en effet, de l'extérieur c'est l'évolution et la modernité, mais au fond c'est tout moisi. On a tout déformé. Puis on l'a mis dans un joli paquet, et voilà. On a confondu la beauté extérieure et la beauté intérieure en tout point.

Un passage que j'ai également adoré, lorsqu'il a parlé de l'importance d'avoir une bonne estime de soi-même, et que c'est ce qui nous permet de tenir debout et d'avancer, si vous en privez les hommes, vous les transformez en chiens écumants. Puis il cite des exemples de crimes commis parce que leur auteur avait une basse estime de lui-même. Combien d'hommes trompent leurs belles femmes parce qu'ils ne se sentent pas à la hauteur ? Le vol, le terrorisme, le viol, le meurtre... autant de crimes dont l'auteur n'est pas satisfait de ce qu'il est. C'est tellement vrai.

Le narrateur de ce livre est un juge pénitent, et Camus lance encore une fois le débat sur ce sujet très compliqué à mon sens, qu'est la justice. J'avais adoré explorer cette notion avec l'animé Death Note, et ici encore le juge dit qu'il prend la défense de ceux qu'il juge être de bons meurtriers, comme d'autres sont de bons sauvages, dit-il. Or comment peut-on juger qui est bon et qui ne l'est pas ? C'est trop difficile car il n'y a pas de bonne réponse. C'est toujours une question de point de vue, d'angle et de perception.

Je vous entends me dire, mais quand on est juge, on ne prend pas parti ! En théorie oui, mais le juge n'est qu'un homme, et au fond, ils doivent tous avoir un petit penchant, minime soit-il, pour un parti plutôt que l'autre. Il a peut-être juste été trop honnête...

Tout au long du livre, j'avais envie de recopier plusieurs extraits, tellement il y en a de très bons ! C'est pour vous dire à quel point j'ai adoré. Mes livres préférés sont certainement ceux-ci, ceux que j'ai envie de recopier, tellement les phrases sont belles, intelligentes et pertinentes à la fois.

Très beau passage sur l'amitié aussi, et un éternel retour au mal de vivre dans chacune de ses pensées. C'est en tout cas le goût que ça a laissé chez moi, à chaque fois.

L'esclavage, "Qu'on soit contraint de l'installer chez soi, ou dans les usines, bon, c'est dans l'ordre des choses, mais s'en vanter, c'est le comble." Ah, j'ai adoré ce passage ! Comment on se ment à nous-mêmes, l'hypocrisie sociale !

La liberté d'expression, l'essence de la philosophie, notre égocentrisme et notre vanité... Ce livre est riche de sujets intéressants et de réflexions qui le sont encore plus !

Enfin, pour résumer, c'est l'histoire d'un homme qui se confesse à un inconnu. Après avoir ignoré le cri d'une femme qui s'est suicidée, il est rongé par la culpabilité et ne peut s'empêcher de se juger lui-même, le jugement de l'autre bien que lourd aussi, n'est pas aussi insupportable que le regard que nous portons sur nous-mêmes. C'est ainsi qu'après avoir rencontré un inconnu dans un bistrot, il se confesse à lui, tout en lui exposant sa vision du monde et de l'Homme.

Il commence par s'auto-juger, tantôt sévèrement, tantôt il se vante et gonfle le torse, mais il ne se juge que pour pouvoir mieux juger les autres... Se soulager d'un poids en le partageant avec tous les hommes.

"Le portrait que je tends à mes contemporains, devient un miroir." Et ce fut effectivement le cas pour moi.

Et puis quelle fin magistrale ! Très beau livre.
Hajar
10
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Créée

le 16 mars 2012

Critique lue 551 fois

2 j'aime

Hajar

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