Haaa ! ça faisait longtemps que je n'avais pas lu du Clarke alors que j'ai une infinie tendresse pour lui ; c'est bien lui qui m'a fait aimer la science(-fiction).


Diaspar ! Cité irréelle que j'imagine figée à jamais dans de l'ambre. Une ambre céleste, diaprée, miellée et piquetée des reflets d'étoiles mortes. L'auteur utilise la très belle expression d'un automne éternel. Il imagine une Humanité du futur très très très (très) lointain, et pourtant terriblement proche de nous, ankylosée et encalminée, lovée, larvée sur elle-même dans son petit cocon, véritable bijou de la technologie, vivant le rêve jour après jour, des millénaires durant...


Bien à l'abri des "Envahisseurs"....


« Tel un joyau resplendissant, la cité reposait au sein du désert. Elle avait autrefois connu le changement et la transformation, mais le temps l'ignorait désormais: tandis que jours et nuits voltigeaient sur la face du désert, un éternel après-midi régnait dans les rues de Diaspar où jamais l'obscurité ne tombait...»


Sous couvert de la trame la plus éculée du genre — le récit initiatique d'un unique, élu seul curieux à même de vouloir aller au-delà des apparences, de changer l'ordre établi — et d'un ventre mou central, se distille une profonde mélancolie, une nostalgie du futur, déjà, et un beau panorama à la fois poétique et humaniste de l'Humanité. Diaspar est la diaspora de nos peur et de nos désirs : tout autant l'utopie absolue que la contre-utopie la plus terrifiante mais jamais A.C.C ne sombre dans les grossièretés transparentes des dystopies habituelles. Là, nul grand méchant tyrannique ou riches consortiums pour nous écraser de leurs talons grossiers, la nature humaine s'en charge très bien toute seule et, vicieuse, se cache et porte le masque. Et on l'appellerait bonheur. Ce n'est pas surligné, ça ne tape pas l'épaule mais ça dit quelque chose.


Puis on décolle pour les Astres, l'univers, l'infini, le désir profond de l'inconnu et tout ce qui pourrait nous attendre ou, tout au contraire, nous décevoir et nous pousser à nous retrancher, à nous cacher. Où Histoire et Légendes s'entremêlent. Clarke a lu Olaf Stapledon et son Créateur d'étoile, ça on ne peut en douter et Baxter a probablement été profondément marqué par ce premier roman, ça aussi difficile d'en douter. Et Dan Simmons également, sûrement.


L'Humanité future de Clarke, dans ce premier roman, loin des horreurs post-humaines qui sont à la mode dernièrement, et la richesse technologique qu'il nous dépeint n'ont pas vieilli d'un poil, c'en est même très souvent visionnaire. Il nous reste même encore de ses triste prophéties à réaliser. Bref, au-delà de tous les grands truismes de la science-fiction qu'Arthur C. Clarke a, si ce n'est directement crée, aidé à fixer en leur forme moderne, on sous-estime bien trop sa puissance onirique, sa légèreté poétique qui touche à la métaphysique la plus nuancée, la plus délicate... et s'il s'en départ quelque peu dans ses romans les plus célèbres (2001, Rama), il les gardera toujours comme profondes et solides fondations.


« Sur cet univers, la nuit tombait ; les ombres s'allongeaient vers un orient qui ne connaîtrait pas d'autre aurore. Mais partout ailleurs, les étoiles étaient encore jeunes et la lumière du matin s'attardait ; et sur le chemin qu'il avait jadis suivi, l'homme, un jour, irait de nouveau.
Mars 1955. »

Nushku
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le 8 févr. 2015

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Nushku

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