Si tu pensais que le XIXe siècle rural était juste une époque de champs dorés et de vie simple, La couleur du lait de Nell Leyshon est là pour te rappeler que pour une fille pauvre, savoir lire et écrire peut être un privilège… et une malédiction.
On suit Mary, 15 ans, une gamine frondeuse et vive, qui vit dans une ferme où la tendresse est aussi rare qu’un repas sans corvée. Quand elle est envoyée chez le pasteur pour s’occuper de sa femme malade, elle découvre un autre monde : celui des mots, du savoir… et du pouvoir que cela donne. Mais tout savoir a un prix, et Mary va l’apprendre à ses dépens.
Là où Leyshon est magistrale, c’est dans son style brut, sans fioritures, mais terriblement puissant. Le récit est écrit comme un journal, sans majuscules, avec une syntaxe simple, comme si Mary nous murmurait son histoire en cachette. Cette voix, directe et sans filtre, te happe immédiatement et donne une authenticité poignante au récit.
Le roman est court mais intense, d’une beauté rude qui te serre la gorge et t’empêche de détourner les yeux. Pas de grandes envolées lyriques, pas de pathos appuyé, juste une vérité nue et brutale, celle d’une fille qui découvre que le monde des hommes est une cage, et que le savoir ne suffit pas toujours à s’en échapper.
Le hic ? Ce n’est pas une lecture "plaisir". C’est un récit dur, implacable, dont tu ressors un peu sonné, avec une colère sourde qui t’accompagne longtemps après la dernière page.
Bref, La couleur du lait, c’est un roman à la fois simple et bouleversant, un cri étouffé sous une écriture d’une justesse redoutable. Un livre qui marque, qui fait mal, mais qui brille d’une lumière douloureuse. Impossible d’oublier Mary… même quand on aimerait ne pas se rappeler.