Hans Magnus Enzensberger est un poète, écrivain, traducteur et journaliste allemand, né le 11 novembre 1929 en Bavière et vivant actuellement à Schwabing, le quartier "bohême" et culturel de Munich.
Prolifique, toujours actif à 92 ans, il a publié sous divers pseudonymes, même des livres pour la jeunesse.
On le dépeint comme « le phare littéraire de la gauche allemande, humaniste et cosmopolite » (4e de couverture / Gallimard).


Son ouvrage le plus connu est probablement "Le Bref Été de l'anarchie : La vie et la mort de Buenaventura Durruti" (1972).


Il a obtenu le prix Jean Monnet des Littératures européennes en 2010 pour "Hammerstein ou l’intransigeance" (2008) (que j’ai lu, apprécié… et oublié… honte) :
" La peur n'est pas une vision du monde. " C'est par ces mots qu'en 1933, Kurt von Hammerstein, chef d'état-major général de la Reichswehr, résolut de tourner le dos à l'Allemagne nouvelle, à Hitler devenu chancelier, et méprisa profondément l'hystérie funeste où s'engageait son pays.


Ce ‘recueil’ a ceci de particulier qu’il regroupe dans l’édition française de 1995 deux textes parus en Allemagne séparément :


La grande migration (Trente-trois jalons, plus une note en bas de page « Sur quelques particularités en matière de chasse à l’homme ») = Die Grosse Wanderung 1992 +
Vues sur la guerre civile = Aussichten auf den Bürgergkrieg 1993, également traduit par "Perspectives de guerre civile", dans lequel il décrit l'être humain comme « le seul primate à pratiquer de manière méthodique, enthousiaste et à grande échelle, le meurtre de ses congénères. La guerre est l'une de ses principales inventions ».


Cette grande migration n’a nul rapport avec un quelconque grand remplacement mais, en 2022, résonne avec une préscience troublante. L’auteur utilise de nombreuses paraboles : celle des voyageurs considérant au fur et à mesure de son occupation leur compartiment de train comme leur possession à défendre, mais surtout celle du canot de sauvetage trop plein vers lequel nage encore un naufragé… Il s’agit bien sûr de comparaisons avec de potentiels immigrés – on ne mentionne que rarement les émigrés…
(La parabole est une figure de rhétorique consistant en une courte histoire qui utilise les événements quotidiens pour illustrer un enseignement, une morale ou une doctrine.)


« Or, qui ne s’aime pas soi-même a vraisemblablement plus de peine que d’autres à aimer le non-prochain »


L’essai aborde ensuite le concept de l’asile, de plus en plus dévoyé, la démographie, les causes des mouvements de populations, qu’elles soient politiques ou économiques, annonçant déjà une migration climatique en formulant les « limites écologiques de la croissance », et questionne la solution éventuelle de la prévention de ces causes. Langue, intégration, assimilation, communautarisme, mondialisation sont inclus dans la réflexion.
Sans creuser trop la notion de culture, l’analyse (d’il y a trente ans, je le rappelle) de l’état multinational que fut l’URSS est criante d’actualité : « Pendant des dizaines d’années, on a tenté à grands frais d’inculquer là-bas à une société multiculturelle des sentiments de solidarité et des objectifs communs. Le résultat a été une implosion aux conséquences encore imprévisibles. »


Je ne vous livre pas la conclusion de la cinquantaine de pages, à propos des barbares et de la liberté tant elle est… pessimiste mais évidente. J’ai pensé qu’ensuite, une relecture des « Identités meurtrières » d’Amin Maalouf (1998) s’imposait.


Dédicace à mes amis Guy, Dominique, Françoise et Nico pour leur intérêt.

DizzyLizzy
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le 20 avr. 2022

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