La Horde du contrevent par V_Berthier
La Horde c'est avant-tout une écriture incroyable, un style aiguisé comme un fleuret qui nous change des traditionnelles (mais efficaces) haches à deux mains stylistiques. Ici on cisèle, on fait de l'orfèvrerie, on s'amuse et on fait du beau. Damasio nous montre qu'il est vraiment doué dans ce qu'il fait et que niveau bagarres contre le langage, il sait taper. D'ailleurs, le langage c'est une bonne partie du sujet du livre. Pas de spoil hein , c'est juste que sur les 800 pages, comptées à rebours, les personnages s'expriment, chacun de leurs voix, sur ce que le autres disent. Une horde de 23 personnes qui font aussi office de seule famille, on parle de communication. Les langues se délient, on discute de ce qu'on vit. Et ça dure plus d'une trentaine d'années.
Car oui, 23 personnages c'est beaucoup, surtout quand les 23 parlent chacun à leur manière. Bon, ils n'ont pas tous droit au même temps de parole mais quand vous arriverez à reconnaître chacun des protagonistes juste à sa manière de s'exprimer vous vous rendrez compte de la prouesse que ça nécessite. Symbolisés chacun par un signe de ponctuation, ou un petit caractère typographique, les personnages vont grandir, bouger et devenir bien plus vivants que de l'encre sur du papier ne le laisserait présager.
L'histoire maintenant.
C'est un récit d'aventure, la Horde remonte les vents pour accomplir sa quête. les vents soufflent, ils sont cruels et ont neuf formes aussi perverses les unes que les autres. Leur quête, ce n'est pas une quête banale, Damasion vise haut. Jeter un anneau dans de la lave à côté de ce que ces gaillards font, c'est un truc de boy-scout. Il s'agit, tout simplement, de découvrir la source des vents qui domine la vie d'une planète entière, et donc de comprendre, enfin, le sens de l'existence.
Alors qui dit quête existencielle, dit philosophie.
Une citation de Deleuze et Guattari donne un coup de pouce au domino day, mais soyons honnête, pour bien saisir tous les enjeux du livre il faut penser, et repenser à ce qu'on a lu, ne pas hésiter à relire par morceaux. C'est un livre titanesque.
Un livre prétentieux aussi, c'est une des critiques qui ressort le plus.
C'est vrai, et il l'assume.
Un indispensable ce bouquin, qui donne à la fantasy française ses lettres de noblesse. Un plaisir de lecture aussi grand que bien des classiques.