Lorsque le septuagénaire et très riche Néron Golden s’installe, en ce mois de janvier 2009, avec ses trois fils adultes au cœur du quartier historique de Macdougal-Sullivan Gardens situé dans Greenwich Village à New-York le voisinage se met à bruisser de rumeurs. D’où vient cet énigmatique personnage, quel trouble secret cache-t-il ? Et lorsqu’il épouse la jeune et sublime Vasilisa, les choses ne vont pas s’arranger. Témoin privilégié des histoires de la famille Golden, le narrateur va largement s’inspirer d’eux pour produire son premier film, puisant dans ce qu’il partage avec eux mais aussi dans ce qu’il imagine et interprète.


Quelle richesse, quel foisonnement dans ce pavé de 500 pages dans lequel Salman Rushdie fait preuve d’une grande acuité et d’une profonde intelligence, accompagnées d’un certain humour et d’une pointe de mélancolie. Si le roman tourne autour de quelques personnages - Néron, ses fils, sa femme, le narrateur – les sujets abordés sont nombreux.


Salman Rushdie situe l’action de ce roman à la jonction entre les présidences d’Obama et de Trump, faisant de cette transition la toile de fond d’une histoire tourmentée et tourbillonnante. Celle de la famille Golden l’est particulièrement qui semble avoir fui son pays d’origine pour échapper à quelques démons et pour se réinventer une vie et une identité ailleurs. Mais échappe-t-on à son passé, à ses racines, à ses drames ? Dans le cas de la famille Golden, on dirait bien que les démons et les fantômes ne les laissent pas en paix.


Chaque personnage possède ici un caractère bien défini dont l’auteur nous offre une analyse très fouillée et précise. Sous les yeux du narrateur, René, jeune cinéaste ambitieux les choses vont prendre une tournure inattendue et tragique. Mais c’est aussi cela qui va servir l’œuvre en construction du jeune homme, lui servir de trame narrative et le conduire au succès. D’ailleurs, il semble y avoir parfois des interférences entre la vie des Golden et le scénario du film avec des indications de mise en scène qui viennent s’intégrer par-ci par-là semant le doute sur ce que le lecteur est en train de découvrir. La vie des Golden ou celle, peut-être, fantasmée par René et dans laquelle il prend une part (très) active ?


Petit à petit, le voile se lève sur ce qu’ont vécu les Golden, père et fils, sur leurs origines et leur histoire. Mais au fur et à mesure que le voile se lève, le danger semble se rapprocher. Le pire est-il évitable ou intrinsèquement lié à leur passé ? Est-il possible de s’affranchir de tout passé ? Les erreurs des pères doivent-elles être payées par le sang des fils ? Autant d’interrogation et de sujets de réflexion que soulève brillamment Salman Rushdie dans ce roman qu’on regrette de voir se terminer.


Christlbouquine
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le 24 janv. 2023

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