Expliquer ce livre n'est pas chose facile, en raconter l'histoire ne l'est pas plus.
Ce qui m'a frappé dès le début dans ce roman, c'est la vulgarité apparente des premières pages. La vulgarité de la vie de tous les jours, que l'on cotoie sans ne plus y prêter attention et que l'on élude généralement de toutes nos descriptions ( y compris littéraire ). Ici, elle est assumée et même revendiquée il me semble car elle est particulièrement exposée dès les premières pages, sans qu'une telle intensité dans la répétition ne soit maintenu tout au long du roman. Pour vous qui ne l'avez pas lu, cette vulgarité banale se trouve essentiellement dans le sexe et la manière dont il est abordé ( ne vous attendez à aucun apparat de ce côté là ), mais aussi jusque dans la façon d'évoquer certaines choses : " j'entrais l'URL ", " je me rendais à l'IP indiquée ". Je trouve ça d'une banalité consternante, ( mais peut être que c'est moi ) et c'est un peu la caractéristique du roman, même si je n'en fais étrangement pas un défaut. Enfin je vous reparle de ça à la suite du prochaine paragraphe.


Un autre élément a rapidement attiré mon attention. J'avais lu que ce livre était un roman d'anticipation, et hormis une culture trop étroite de ma part ( ce qui est tout à fait plausible ), ce livre n'a pour moi rien d'une anticipation. Il ne s'intéresse nullement à ce qu'il pourrait advenir des hommes dans tel ou tel situation, et tout cet aspect du texte m'a bien vite semblé n'être qu'un outil à la fois de l'intrigue ( si l'on peut dire ) et de la narration. Pour moi, à aucun moment il n'y a la prétention d'envisager un futur possible de l'humanité, d'évoquer sérieusement la fin des religions actuelles( et je préfère vous dire que si c'est le cas, c'est tout à fait raté ). Tout ça est évoqué de manière absolument superficielle, et à mon avis la raison toute simple est que ce n'est pas le sujet du livre. Cet aspect accompagne et confirme une certaine vision de la décadence, de l'impossibilité pour les hommes de supporter en somme leur condition, et en même temps de l'absurde de tenter de la fuir ( ce n'est que mon avis cependant ). Un autre argument pour étayer ma thèse est que ce livre raconte la vie de Daniel1, et que tout se base autour de lui. A mes yeux l'auteur n'a envisagé le futur que pour qu'il fasse un écho à la vie de Daniel1 et à aucun moment il n'y a eu un travail d'anticipation ( ce qui ne dessert en rien le livre, il ne faut pas simplement le lire en s'attendant à trouver des idées intéressante ou novatrice sur le sujet). En exagérant tout de même, celui qui cherchait à y trouver un bouquin d'anticipation doit ressentir à peu prêt la même déception que celui qui voulait voir un film de super-héro en regardant Birdman.


Bon, venons en au fait. L'histoire est celle de Daniel1, un humoriste qui nous livre son autobiographie très personnelle. Au fil des pages nous en apprendrons ainsi plus sur ses relations amoureuses, sa vie somme toute banale même si auréolée de succès.
Selon mon décompte, il se passe à peu prêt trois événements important durant le récit. Trois passages où le ton change, la platitude ambiante s'effrite.
Une chose intéressante me vient à l'esprit, et une question à laquelle je n'ai pas su répondre. Je me demande si la raison pour laquelle je ne me suis pas ennuyé devant ce livre est uniquement qu'il était relativement bien écris, fluide, ou parce qu'il était bon et plus profond qu'il n'en a l'air ? Peu de phrases m'ont accroché, presque jamais je n'ai été saisi par la beauté d'un moment, l'intelligence d'une réplique ou encore la force d'un sentiment. Quand je pense à décrire ce livre je pense à la banalité, au plat, au réalisme un peu sale. Pourquoi ne me suis-je pas ennuyé ?
Et bien je crois avoir trouvé un début de réponse dans une autre critique que j'ai lu juste avant d'écrire la mienne. Ce roman raconte la vie dans toute son horreur, sa douleur, sa fragilité et son pathétique. Mais il le fait avec la froideur d'un ethnologue. Avec un regard scientifique. Et c'est probablement cet aspect qui donne tout son intérêt au reste.
C'est un espace dénué de bon sentiment, un lieu brut. J'ai trouvé cette formule assez juste.


La fin du livre, dans ses 100 dernières pages environ, est assez belle. Assez touchante même. Et comporte quelques idées qui m'ont bien plu sur l'homme dans sa généralité. Disons que je recommanderais ce livre, mais sans certitude qu'il plaise.

RomTi
6
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le 28 mars 2017

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Rom Ti

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