Dans un futur proche, la Terre, qui maîtrise le voyage spatial, est en guerre contre un peuple extra-terrestre dont l’aspect insectoïde lui a valu le surnom de « doryphore ». Andrew « Ender » Wiggins, jeune garçon de six ans, est enrôlé à l’école militaire pour devenir chef de guerre. Mais les conditions de vie et l’entrainement sont particulièrement durs.

Paru en 1985, La Stratégie Ender est le livre qui a imposé Orson Scott Card comme l’un des écrivains majeurs de la décennie. En pleine explosion du cyberpunk (Neuromancien de William Gibson sort un an avant), Ender se situe à l’opposé de ce courant : au premier abord le récit semble plus proche d’un starship troopers pris au premier degré, avec ses terriens menacés par d’immondes extra-terrestres. Néanmoins le roman se révèle rapidement plus fin que cela. Tout d’abord, Card est l’un des écrivains les plus à l’aise avec les personnages enfants. Si Ender n’est pas aussi réussi qu’Alvin le faiseur ou que le prodige des Maitres Chanteurs, la psychologie générale des jeunes est une réussite, de même que les relations enfants-adultes. L’auteur maitrise particulièrement bien la montée en puissance d’Ender, ses angoisses et ses questionnements, en parallèle avec la tension imposée par l’encadrement militaire, elle-même tiraillée entre son objectif absolu (gagner la guerre) et ce qu’elle fait subir à ses élèves.

Le roman souffre quand même de quelques défauts : d’une part un déséquilibre entre une trop longue première partie et une deuxième partie extrêmement brève, d’autre part il est marqué lourdement par les pensées personnelles de Card : la persistance du pacte de Varsovie dans le futur ainsi que le fonctionnement collectiviste des doryphores sentent fort l’anticommunisme primaire, de même que les débats entre Démosthène et Locke. Mais ces défauts sont mineurs face aux qualités du récit.

Presque 30 ans après sa parution, La Stratégie Ender est un roman toujours aussi efficace et le chef d’œuvre de son auteur. Si son classicisme (il aurait certainement pu être écrit vingt ou trente avant sans grande différence) explique sans doute ses prix Hugo 86 et Nebula 85, il ne le dévalue pas pour autant.
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le 29 janv. 2013

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