La littérature érotique est toujours un art difficile. Il faut choisir entre le chaste du contemplatif à l'anglaise, qui mise sur l'émotion tendre et le pourpre montant aux joues de jeunes filles encore vierges à la vue d'un beau Lord un jour de chasse à courre, et le franchement pornographico-littéraire, que certains auteurs affectionnent sans honte, mais sans qualité littéraire. Aussi, quand on lit La Tentation, premier roman de Benjamin Schneid, inconnu au bataillon, on est agréablement surpris de voir que qualités narratives et érotisme assumé font parfois très bon ménage...

Benjamin est un étudiant nantais dans sa fraîche vingtaine, esthète homosexuel, ancien volleyeur et vivant en colocation avec son frère Bastien. Avançant dans la routine de la fac et des amis, il croise Grégory dans le tramway, son ancien entraîneur de volley, icône sexuelle d'un ex-adolescent toujours en émoi. Benjamin et Grégory sympathisent, la différence d'âge s'estompant peu à peu, et Benjamin finit par être invité de manière régulière chez Grégory et son colocataire Cyril, tous deux anciens membres de l'équipe de volley dont faisait également parti Bastien, le grand frère et colocataire de Benjamin. Grégory, hétérosexuel devant l'éternel, finit par franchir le pas avec Benjamin, amoureux comme jamais. De là tout se complique, les langues se délient et des secrets se révèlent. Pourquoi Cyril et Bastien ne se parlent plus depuis l'époque du volley ? Que se passait-il pendant les soirées arrosées qui suivaient les matchs ? Grégory se découvre-t-il gay, ou était-ce juste une incartade ?

Ce résumé un peu Arlequinesque de La Tentation peut prêter à sourire, mais le pari de l'auteur est réussi : que l'homo qui ne s'est jamais entiché d'un hétéro inaccessible, devenu objet de culte voire de fantasme, éteigne son ordinateur ! Car c'est bien de ça qu'il s'agit avec La Tentation, vivre enfin notre fantasme de convertion, réussir à épouser l'inaccessible. Parsemé de passages érotiques très efficaces, le roman devient source d'embarras quand on le lit au travail... Les âmes sensibles (et mineures) s'abstiendront donc d'en faire la lecture ! Pour ceux qui n'ont pas froid aux yeux, Schneid nous fourni là une très belle histoire, mêlant fantasme et réalité, pour notre plus grand plaisir.
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le 27 sept. 2010

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Brice B

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