La Voie Epique bis (oui, cette critique est la même pour les deux tomes, moi je l'ai lu en un seul,

Épique.
Voilà comment l’on pourrait résumer en un seul mot ce point de départ de la saga des Archives de Roshar, présentée comme la série la plus ambitieuse de Brandon Sanderson.
Épique, car bien avant sa parution, l’auteur a parfaitement su mettre l’eau à la bouche de ses lecteurs et fans de la première heure, en annonçant une histoire dont la démesure s’étale en quelques chiffres : 10 tomes annoncés, 20 systèmes de magie, 380 ko d’intrigues et de sous-intrigues, et un premier tome affichant au compteur plus de 1250 pages pour le format poche… Steven Erikson, Georges R.R. Martin et Robert Jordan sont prévenus, Brandon Sanderson compte laisser, sinon une empreinte dans le domaine de la fantasy épique, à tout le moins une véritable muraille de Chine du genre.
Voici donc venir une œuvre dont le gigantisme s’affiche avant même que soit ouvert le premier livre de cette histoire au long cours. Pour autant, l’auteur a-t-il véritablement les moyens de ses (colossales) ambitions ? Parvenu au bout de ce premier tome, il apparaît difficile de se prononcer véritablement sur la question.
Concrètement, La Voie des Rois illustre l’intégralité des points forts et faibles de l’auteur, sans que ceux-ci aient véritablement varié d’un pouce depuis la trilogie Fils-des-Brumes.
Le tout début de l’histoire montre au lecteur que Sanderson n’a rien perdu de son originalité en matière de création de systèmes de magie à la fois innovants et très visuels. Il est cependant aisé de ressentir que ce premier tome n’a pas pour but de dévoiler toute la structure de ces divers systèmes. Au contraire, il n’en montre qu’une parcelle, ne les aborde que par un bout ou l’autre. Le flou autour de l’utilisation de la magie donne ainsi l’envie et la frustration nécessaire au lecteur pour se poser les questions et imaginer les théories les plus folles quant à son origine, ses potentialités et ses éventuelles limites.
Cette volonté assumée de laisser volontiers le lecteur dans une sorte de « flou artistique » se retrouve également exprimée à travers l’histoire de ce monde créé de toute pièce. Tout au long de l’intrigue, le passé de Roshar se dévoile uniquement par petites touches, de manière parfois abrupte (on pense notamment aux visions de Dalinar, nous y reviendrons) ou plus subtile au détour des réflexions et interactions de certains personnages. Toujours est-il que le peu qui nous en est montré souligne qu’à l’évidence Brandon Sanderson a travaillé son univers comme jamais il ne l’avait fait précédemment. Agrémenté tout du long de superbes illustrations, c’est un véritable contrepied à un univers de high fantasy typique qui nous est ainsi proposé. Point question ici de forêts ou de dragons mais au contraire d’un monde rocailleux, balayé par des tempêtes d’une grande violence où le bestiaire s’apparente à un habile croisement entre crustacés géants et roche. Un mélange certes improbable mais qui se tient parfaitement dans cet univers violent, dominé par la guerre, où la recherche d’armures et d’armes surpuissantes entraîne les hommes à s’entre-déchirer. Et c’est dans ce maelstrom que sont jetés Kaladin, Shallan et Dalinar, les trois héros principaux de l’histoire. Et l’on en vient là à aborder le premier écueil du récit. Car si dans ce premier tome les storylines de Kaladin et Dalinar font mouche (celle du premier utilisant habilement les codes de la high fantasy, celle du deuxième introduisant les intrigues de cour couplées à des découvertes sur l’histoire de Roshar grâce notamment aux visions du passé, l’un des moteurs de l’intrigue de ce premier tome), il n’en va pas de même pour celle de Shallan. Mal introduite, l’auteur ne parvient jamais vraiment à faire décoller l’histoire de la jeune femme qui souffre de la comparaison avec ses homologues masculins. Elle se fait même voler la vedette par un personnage secondaire (en la matière, on ne peut que souligner les excellents seconds rôles de l’histoire qui apportent leurs lots d’intrigues en tout genre).
Et c’est donc en partie à cause de ce personnage que l’on décèle le gros point noir de ce premier tome : sa longueur. Certes, Brandon Sanderson semble avoir beaucoup de choses à nous raconter, mais, à la lecture de certains passages, il paraît difficile de ne pas se demander pourquoi le roman n’a pas été écourté. De fait, le récit met plus d’une fois l’attention du lecteur à l’épreuve tant il ne se passe pour ainsi dire pas grand-chose, notamment lors du premier et troisième quart du livre. La faute en revient principalement due aux atermoiements de Shallan, mais aussi, dans une moindre mesure, à ceux de Kaladin (dont certains éléments du passé s’avèrent franchement dispensables).
Heureusement, le système Sanderson finit toujours par faire s’emballer le récit sur sa fin et les 150 dernières pages contiennent leur lot de moments épiques en diable, couplés à quelques révélations finales savamment dosées qui laissent au final l’impression au lecteur que celui-ci a assisté à une sorte de gigantesque introduction à quelque chose d’encore plus grand.
Il serait donc faux d’affirmer que l’on est ici en présence d’un monument de la fantasy à la seule lecture de ce roman. Certes, La Voie des Rois est un très bon récit de fantasy épique qui se démarque aisément de la masse du tout-venant, non dénué de défauts, il saura aisément plaire aux amateurs du genre et aux fans de l’auteur.
Pour l’instant c’est tout ce qu’on lui demande, en attendant d’en lire davantage sur Roshar.

Guigz94
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le 7 déc. 2015

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Guigz94

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