C’est avec beaucoup d’attentes que j’ai démarré la lecture de L’âme de fond, le premier roman de Julia Clavel. Et ce parce que le sujet abordé – la santé mentale – et le sublime jeu de mot du titre – lorsque notre santé mentale vacille, nos pensées déferlent dans notre esprit et peuvent noyer notre âme – ont fortement éveillé mon désir de lecture. Mais également parce qu’ayant personnellement eu un début d’année difficile (un élément déclencheur m’a poussé à m’interroger sur moi, sur mes choix de vie, sur les raisons qui me poussent à me lever tous les matins, me faisant vaciller sur mon socle, me faisant même presque remettre en cause certains choix qui étaient actés depuis très longtemps – mais la raison est vite revenue et, si j’ai vacillé, je ne suis pas tombé), la santé mentale est un sujet qui me tient particulièrement à cœur en ce moment.
Je dois avouer que les premiers chapitres m’ont laissé perplexe, et notamment le premier où apparaît le personne d’Hadrien. Ce chapitre brossant le dialogue entre une psychologue et un patient qui ne sait pas ce qu’il fait là vu qu’il ne croit pas en l’efficacité de la psychologie, qui jure ses grands dieux qu’il ne reviendra pas et qu’il est là uniquement pour obtenir des somnifères (ce qu’il n’aura pas, étant donné qu’un psychologue ne peut pas prescrire de médicaments) m’a semblé très cliché, très poussif.
Mais aussitôt après ce passage obligé, le récit prend tout son sens et le talent d’écriture de Julia Clavel se révèle. C’est intéressant de voir quelqu’un qui a été conseillère économique du Premier ministre et du président de la République, faire dire à un de ses personnages que le champ lexical que son patient, ministre de la santé, utilise est celui du spectacle et de la comédie.
C’est intéressant de voir une personne qui siège au comité exécutif d’un grand groupe français spécialisé en santé mentale donner vie à un roman qui, en creux, avance le fait que les gens ne seraient pas heureux car beaucoup se satisfont d’une vie guidée par les conventions sociales, mais dans laquelle ils se sentent étriqués et dont ils n’ont pas envie et qu’ils subissent – ce dont je suis intimement convaincu. Julia Clavel tire se fil et tisse un roman interrogatif très bien tressé.
La quatrième couverture du roman se termine sur ces mots : « Et si le plus grand danger n’était pas dehors, mais au cœur de nos contradictions ? » C’est une évidence, et, comme beaucoup d’autres, j’en suis la preuve vivante !