Bon..
Alors deja Je ne vais pas nier l’importance historique de Yvain ou le Chevalier au Lion. Chrétien de Troyes est l’un des premiers à poser les bases du roman en langue française. Il invente des formes, joue avec les codes naissants de la chevalerie, de l’amour courtois, et de l’aventure. On lui doit une part immense du mythe arthurien. Mais une fois qu’on a mis tout ça de côté, une question reste : est-ce que c’est un bon roman ? Et ma réponse est non. Pas vraiment. À peine passable, même.
Le récit souffre d’un manque flagrant de subtilité. Tout est surjoué, sur-écrit, balourd. L’amour ? Yvain tombe amoureux en regardant une femme deux secondes à travers une fenêtre. C’est censé être intense, poétique — c’est surtout vide. On ne ressent ni passion, ni désir, ni complexité. C’est un schéma, pas une émotion. Pareil pour les retournements : il oublie son serment, elle le rejette, il devient fou… puis il revient, fait quelques exploits avec son lion, et hop, tout est pardonné. C’est presque comique tant les enjeux semblent vidés de leur substance.
Sur le plan structurel, le roman est mal rythmé. Les péripéties s’enchaînent comme dans une série d’épisodes vaguement reliés entre eux. L’unité du récit est artificielle. Le lion, qui aurait pu être un symbole puissant (de fidélité, de nature domptée, de rédemption), devient une sorte de Deus Ex Machina mignon qui le sauve à chaque fois qu’il est dans la merde. L’animal est presque mieux caractérisé qu’Yvain lui-même.
Quant à la prose meme adaptée en français moderne elle reste lourde et répétitive. Les descriptions sont pauvres, les dialogues rigides, et les combats mécaniques. Ce n’est pas un roman qui cherche à montrer, mais à exposer, presque à prêcher. On sent le clerc derrière l’écrivain. On veut faire de la morale, transmettre des idéaux chevaleresques, mais on oublie de construire des personnages vivants.
Et puis, soyons honnêtes : c’est bourré de clichés. L’honneur, la gloire, la dame à sauver, le chevalier solitaire, le château enchanté, la magie qui tombe du ciel… On pourrait dire que c’est normal, que Chrétien est celui qui les invente. Mais il n’en fait rien de profond. Il pose des symboles, mais ne les creuse pas. On est très loin de la richesse psychologique qu’on trouvera plus tard chez Dante, ou même dans certains récits arabes ou byzantins de la même époque.
Bref. Yvain, c’est un texte fondateur, oui. Il faut le lire si on s’intéresse à la naissance du roman, à l’imaginaire médiéval, à l’histoire littéraire. Mais c’est un récit mal construit, mal incarné, et parfois même maladroit. À lire pour comprendre le passé, pas pour se laisser emporter. Le lion mériterait presque un spin off. Le reste ? À oublier.