Le bon Denis
Le bon Denis

livre de Marie Ndiaye (2025)

https://sospoilogie.wordpress.com/2025/09/13/le-bon-denis-de-marie-ndiaye-2024/


Un texte au statut assez particulier. Il s’agit en réalité de quatre récits qui tournent autour de l’autobiographie et de la fiction. Les quatre chapitres ne sont pas liés les uns aux autres, à part sur un jeu avec le prénom Denis qui revient dans chaque texte, comme un clin d’oeil.

Dans le premier chapitre, la narratrice parle avec sa mère internée dans un EHPAD de luxe de son père et d’un certain Denis qui aurait pris la place de son père après le départ de celui-ci. Le deuxième chapitre est plus confus, c’est un mélange de souvenirs, de phrases non terminées, entre l’enfance de sa mère et de son père que j’ai un peu passé. Dans le troisième chapitre, la narratrice se demande si son père immigré africain était vraiment bienvenu en France et épouse enfin le point de vue du père. Le dernier chapitre narre la visite de la jeune fille à son père, dans le pays où il a déménagé, dans l'hôtel qu’il dirige.


Ce qui ressort de ce texte, c’est un sentiment d’étrangeté et de malaise. D’abord, c’est le jeu sur la fiction, l’autofiction et l’autobiographie, qui crée un doute. Marie NDiaye parle-t-elle de son père et de sa mère ? Est-ce vraiment sa mère qui est si horrible dans sa maison de retraite, a-t-elle vraiment eu une relation de trois ans avec ce bon Denis, employé municipal dont la narratrice n’a aucun souvenir ? Ce père étranger qui est venu en France puis reparti, et qui n’a pas été accueilli de manière bienveillante par “pépé et mémé”, est-ce un souvenir réel ou fictionnel ? La jeune fille de 18 ans qui rejoint son père dans son pays d’origine et qui est déçue de la rencontre qui n’a presque pas lieu avec son père, est-elle biographique ou romancée ? Il s'agit de quatre petites nouvelles qui sèment le doute.

L’étrangeté est doublée par la langue et la structure du texte. Marie Ndiaye arrive de manière subtile à créer du jeu dans l’histoire qu’elle raconte, dans les histoires qu’elle raconte plutôt. Dans le premier comme dans le dernier chapitre, on ne devine pas très bien le degré de crédibilité du narrateur, la véracité de l’histoire racontée. Il y a un point de vue subjectif sur une histoire bancale, rien n’est solidement ancré, tout est flou, ce bon Denis a-t-il existé ? Le père a-t-il quitté la mère ou est-ce l’inverse ? Le père est-il directeur de l’hotel ? Reconnait-il ses enfants ? Quel est ce garçon qui semble être le jumeau de la narratrice ?

Tout cela est assez bien fait, avec quelques photos de photographes ou de l’autrice, pour brouiller les pistes une fois de plus. néanmoins, je trouve qeu c’est tun tout petytit livre, un jeu d’écriture, un petit bonbon litteraire, mais pas grand chose de plus.


Le troisième chapitre est le plus intéressant politiquement, mais le moins original stylistiquement. La narratrice montre qu’elle a mis du temps à épouser le point de vue de son père. Elle a longtemps cru qu’il avait eu la chance d'émigrer en France, dans ce pays accueillant qui lui permettait un avenir brillant. Ainsi, elle n’a pas compris son exil de la France vers l’étranegr et toujours considéré ce choix comme absurde. Or, elle a finalement compris son père et son point de vue. Peut-être qu’il n’a pas été si bien accueilli que cela en France, pas même par ses propres beaux-parents “pépé et mémé”. Peut-être qu’il a senti que le racisme était si profond qu’il n’aurait jamais eu un bel avenir et qu’il a fait le bon choix de quitter ce pays qui l’aura toujours considéré comme un Autre. Ce court chapitre est très intéressant pour qu'on comprenne, plus ou moins de l'intérieur, le point de vue de celui qui comprend enfin comprend enfin celui qui subit le racisme. Le tout avec un procédé littéraire classique mais percutant, l’anaphore, concrètement ici le “je n’ai jamais pensé que mon père”. Cette personne qui se décille face au racisme était présent dans le texte A bout portant, Versailles 1972, de Philippe Artières.

Jo_Babouly
6
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le 13 sept. 2025

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