Dans la France de l'entre-deux-guerres, Jake Barnes, journaliste américain résidant à Paris, présente sa vie, ses amis, ses voyages dans un récit de quelques mois, sur fond de tintements de verres. Ancien soldat, il a été blessé au front lors de la guerre, et a été émasculé, il ne parle jamais directement du sujet, mais on le comprend à demi-mot, dans ses silences et les sous-entendus de ses proches. Fou amoureux d'une certaine Brett, aussi appelée Lady Ashley (elle a obtenu son titre de noblesse en épousant un notable anglais), il se désespère en voyant qu'elle va épouser l'un de ses amis : Micheal Campbell, un homme respectable, mais dont l'alcool fait ressortir les pires aspects. De plus, la belle est également courtisée par Robert Cohn, un ancien boxer juif, qui n'a d'yeux que pour elle, et la suit partout en espérant avoir un jour ses faveurs. Ce dernier est la tête de turc de ses camarades. Jake et Brett ont eu une liaison, mais elle n'a pas réussi à se faire au handicap du personnage principal. La dame est inconstante, frivole, sa beauté est plutôt fade, mais sa séduction se trouve dans son charme et sa grâce qui rendent les hommes fous, elle s'est approprié le titre de lady et se comporte comme telle. Elle brise le cœur de Jake, en venant vers lui, puis le repoussant, et disparaissant pendant des semaines sans explications. Elle partage avec les autres personnages du roman un penchant plus que prononcé pour tout les alcools, avec un goût pour les fines et l'absinthe. Les amis vont tous se retrouver lors d'un voyage en Espagne pour profiter des célèbres fêtes de San Fermin.


J'avais souvent entendu parler d'Hemingway, surtout dans des contextes de guerre, et c'est pour ça que je n'avais jamais eu le courage de le lire, et qu'elle n'a pas été mon erreur. Moi qui suis une inconditionnelle de Céline (Ferdinand), je retrouve ici une atmosphère familière, le Paris d'après guerre qu'on ne retrouve nulle part ailleurs, et ceci sans le style chaotique de l'auteur sus-cité, qui peut, je le comprends, le rendre illisible pour beaucoup de lecteurs. Non, Hemingway, lui, a un style très fluide, tout à fait naturel, il ne s'encombre pas d'un dictionnaire des synonymes, et qu'importe si il répète trois fois "montagne" dans un paragraphe, il n'y a chez lui aucune lourdeur. Tant de légèreté que même les sujets les plus graves, sont traités avec une nonchalance, qui relèverait plus de la pudeur que du manque de sentimentaliste. Car Hemingway est capable de mettre de l'émotion dans ses mots ; et je m'étonne encore de m'être émue devant des descriptions de corridas, "sport" que je suis loin d'affectionner, et encore c'est un euphémisme. L'auteur fait une véritable peinture des arènes et de la tauromachie, avec finesse, sans prosélytisme, sous le soleil brûlant d'une Espagne plus vraie que nature. Les personnages ont tous du relief, et on s'attache même à Brett qui est une vraie garce, pourtant le seul qui paradoxalement est transparent c'est le narrateur et personnage principal, il met la femme qu'il aime dans les bras d'autres hommes, et autant que les évènements semblent provoquer chez ses amis des réactions disproportionnées, les drames passent à travers lui sans l'atteindre, ou l'atteignent peu. C'est le seul bémol que je note dans le roman du prix Nobel émérite.

Deux adaptations furent inspirées de ce livre : l'une en 1957 réalisée par Henry King et l'autre un téléfilm en 1984 par James Goldstone.
Diothyme
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le 21 févr. 2011

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