Le Tigre blanc
7.6
Le Tigre blanc

livre de Aravind Adiga (2008)

Voilà un roman assez trépidant qui jette un regard très acerbe sur l'Inde moderne et qui mélange étonnamment polar réaliste, critique sociale de haute volée et bildungsroman déjanté. Le Tigre Blanc, c'est le surnom de Balram, un homme d'affaire indien qui va écrire une étonnante confession adressée au... premier ministre chinois, en visite en Inde. Cette confession, écrite en sept nuits, va reconstruire la vie de cet anti-héros cynique et malin, depuis son enfance misérable dans son village natal, sous la coupe de sa famille et des mafieux locaux, jusqu'à une réussite sociale bien mal acquise à Bangalore, cette ville saisie par la frénésie de l'internet et de la sous-traitance qu'elle autorise.


J'ai aimé que "Le tigre blanc" ne prenne pas de gants avec son lecteur. Aravind Adiga ne nous fait pas cadeau d'un personnage idéaliste et obstiné, il nous propose au contraire un héros aussi habile à jauger son environnement de misère qu'il l'est à dissimuler ses sentiments et ses projets à ses patrons. Il y a du Machiavel dans ce roman très cru
Le portrait au vitriol des riches indiens, corrompus et gavés, qui circulent dans leur 4x4 teintés au milieu du trafic monstre des mégapoles indiennes, sirotant leur whisky tandis que des mendiants en haillons frappent aux fenêtres, n'a d'égal que la peinture brutale de l'avilissement quasi-volontaire de millions d'indiens au service des puissants. Adiga s'en prend aux privilèges et à la vulgarité des riches, comme il s'attaque à l’abrutissement de masses laborieuses qui frémissent pourtant régulièrement des rêves de révolte. Alors que tout le monde exploite tout le monde, curieusement l'un des rares personnages attachants du livre sera le patron de Balram, un homme naïf qui ne parvient pas à rester indifférent au sort de ses servants.


Balram, lui, est un jeune homme rusé et amoral, qui juge tout et n'importe qui, et qui englobe de son mépris aussi bien ses maîtres que ses pairs. Son parcours traverse les castes, les rigueurs, les enjeux et les cruautés de la vie indienne moderne et on appréciera (sans pardonner ) le dilemme qu'il devra affronter pour sortir de la masse. Je reste bluffé par la multitude des observations quasi journalistiques que nous glisse ce livre , sans perdre pour autant son focus sur le destin et la psychologie de son héros. Comme je le disais, un très beau mélange des genres.


Je vous recommande cette lecture endiablée et très actuelle, qui fait vivre avec force la réalité hallucinée du monde indien !

nostromo
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Mes étagères se remplissent , Ikea est content... et Au risque d'apprendre quelque chose... :-)

Créée

le 7 mars 2017

Critique lue 330 fois

1 j'aime

nostromo

Écrit par

Critique lue 330 fois

1

D'autres avis sur Le Tigre blanc

Le Tigre blanc
nostromo
7

Bangalore Blues...

Voilà un roman assez trépidant qui jette un regard très acerbe sur l'Inde moderne et qui mélange étonnamment polar réaliste, critique sociale de haute volée et bildungsroman déjanté. Le Tigre Blanc,...

le 7 mars 2017

1 j'aime

Le Tigre blanc
laurentN
9

L'Inde cynique

Le narrateur raconte son ascension sociale dans l'Inde moderne : un parmi les Intouchables, il devient -un peu par accident, mais beaucoup par son intelligence exceptionnelle (comme est rare le Tigre...

le 3 août 2012

1 j'aime

Le Tigre blanc
domguyane
7

l'humour noir contre la corruption

Comme Rorehinton Mistry et Vikas Swarup, voire Vikram Chandra, Aravind Adiga utilise ironie et humour noir pour dénoncer l'extrême violence et la corruption institutionnalisée de l'Inde. Un livre...

le 5 févr. 2012

1 j'aime

Du même critique

The Leftovers
nostromo
4

La Nausée...

Saison 1 seulement ! (Et pour cause!) The Leftovers n'est pas vraiment une série sur la "rapture" chrétienne, ni sur les extra-terrestres ou tout autre concept fumeux... Il y est plutôt question de...

le 29 sept. 2014

36 j'aime

10

Le Tombeau des lucioles
nostromo
10

La guerre, oui, mais d'abord l'enfance...

Quand j'ai vu "Johnny got his gun", je savais très bien à quoi m'attendre. Et ça ne m'a guère aidé... Pour "Le Tombeau des lucioles", je n'avais aucune idée de ce que j'allais voir, et je vois bien...

le 17 avr. 2013

35 j'aime

4