"... Et, quelquefois, dans un effort pour remettre le cap sur mon logis, en fixant, d'après les principes nautiques, mes yeux sur l'étoile polaire, cherchant ambitieusement mon passage au Nord-Ouest, pour éviter de doubler de nouveau tous les caps et les promontoires que j'avais rencontrés dans mon premier voyage, j'entrais soudainement dans des labyrinthes de ruelles, dans des énigmes de cul-de-sac, dans des problèmes de rues sans issue ..."
C’est à Baudelaire (encore), dans ses « Paradis artificiels » que l’on doit la découverte de cette œuvre si singulière de Thomas de Quincey, qui mêle avec virtuosité poésie, humour noir, philosophie et érudition ; synthèse miraculeuse à laquelle, seuls quelques auteurs privilégiés sont en mesure de donner vie. On citera ici simplement Swift et Lichtenberg par la sorte de parenté qu’ils ont avec notre auteur. A cette parenté, se rajoute la forme romantique si caractéristique du XIXème siècle, qui fait de De Quincey un auteur profondément « européen », dans un sens qu’il serait bien difficile de saisir en se référant à ce qui constitue la misérable Europe que nous connaissons aujourd’hui. Une époque où tout citoyen anglais cultivé trouvait fort naturel de maitriser la langue française et où un français trouvait lui fort agréable de converser en anglais, n’ayant pourtant en vue aucun profit marchand.
Mais notre prolixe auteur ne s’arrêta pas en si bon chemin et beaucoup se surprendront de le retrouver, cité en référence par Marx dans son Capital, et donc dans un domaine qui a désormais fort peu de lien avec la poésie ; l’explication tient au fait que notre homme avait le sens du commun et de l’universel, justement. Et que c’est peut-être bien cela qui fait les vrais poètes, en finalité …
steka
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le 3 sept. 2012

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le 3 sept. 2012

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