Avec "Les guerriers de l'hiver", Olivier Norek livre plus qu'un roman, il délivre également un avertissement.
Par ce récit de guerre très réaliste et dont la fiction ne masque jamais la véracité des faits, voire des dialogues, l'auteur de romans policiers explore ici le genre du roman historique et rapporte avec talent les causes et conséquences d'une guerre méconnue des Européens, bien qu'elle se soit déroulée sur le Vieux Continent.
La Guerre d'Hiver qui opposa l'Union soviétique à la Finlande du 30 novembre 1939 au 13 mars 1940 fut déclenchée à la suite de l'invasion de cette dernière par l'URSS de Staline, ce dernier n'ayant aucun souci de la souveraineté d'une nation.
Les pays occidentaux, eux-mêmes entrés en guerre contre le IIIème Reich quelques semaines auparavant, n'ont pas osé se disperser et venir au secours du pays des neiges lointaines que L Ours russe se proposait de croquer en deux bouchées. Une "opération spéciale" qui devait en effet durer deux semaines mais qui, au final, fut extrêmement meurtrière, notamment côté russe (800 000 morts contre 340 000 côté Finlande) puisque les soldats soviétiques étaient mal entraînés et pas du tout équipés pour affronter des températures descendant au-dessous des -30°. Aucun ne savait même skier, savoir indispensable en la circonstance.
"Opération spéciale", "invasion", "non respect de la souveraineté des nations libres", "Staline"... ça ne vous rappelle rien ? Pourtant, on sait bien qu'il n'y a pas que la dernière syllabe de leur nom qui unit le tyran soviétique d'hier et le tyran russe d'aujourd'hui. Comme le dit si bien l'auteur, un pays ne se considère pas en guerre tant qu'il n'a pas eu son premier mort sur son sol.
Au-delà du parallèle évident et alarmant entre ce conflit d'hier et la crise géopolitique d'aujourd'hui, "Les guerriers de l'hiver" tient toutes ses promesses d'un récit bien documenté et bien rythmé qui se lit vite et bien, avec en surimpression derrière le texte, des scènes qui rappellent clairement le film "Stalingrad" (2001) de Jean-Jacques Annaud. Rien de plus normal puisque dans les deux oeuvres, la narration s'attache particulièrement à la personnalité et aux actes d'un sniper. Ici, il s'agit de Simo Häyhä, jeune fermier finlandais tireur d'élite, devenue une véritable légende et figure patriotique et surnommé "La Mort Blanche" (en raison du camouflage des uniformes).
Capable de rester des heures sans bouger dans un froid meurtrier, masquant sa respiration en gardant de la neige en bouche, rendu invisible par son camouflage blanc intégral, tirant sans lunette de tir pour éviter d'être repéré par un reflet traitre, ce soldat de petit gabarit (1,52m) aurait abattu à lui seul près de mille soldats russes.
J'ai énormément appris au cours de cette lecture et je trouve qu'il y a un très bon équilibre entre l'action à proprement parler et les éléments de contexte. Les trajectoires personnelles de la poignée de personnages mis à l'honneur sont touchantes et réalistes, on sent que la fiction colle vraiment à la réalité.
Un roman qui fait réfléchir, et qui fait peur également, ne nous voilons pas la face.