A priori, cette transposition très libre, dans le monde des Trois Mousquetaires de Dumas, d'éléments de fantasy a de quoi séduire. On a vraiment envie de se laisser embarquer et on se dit qu'on va se délecter. Tous les ingrédients sont présents, comme dans un grand classique du genre : Une équipe de « lames » de choc, dont les membres sont suffisamment hétéroclites et bien campés pour susciter l'intérêt, un cardinal de Richelieu despote et manipulateur à souhait, des hommes-reptiles inquiétants, des dragons ancestraux, des intrigues, des duels et des combats à l'épée enflammés, des messes noires « draconiques », tout cela dans un « vrai » Paris du XVIIème grouillant et malodorant...
Malheureusement, quelque chose freine vite l'enthousiasme initial... Ce qui empêche de se laisser complètement accaparer par l'histoire et de s'identifier aux personnages, comme il se doit dans tout bon roman d'aventure, est au début indéfinissable. Peu à peu, on comprend que c'est le style même de la narration qui, à mon sens, pose problème. Le parti pris de l'auteur, manifestement assumé tellement il est criant quand on en prend conscience, a été, un peu à la manière de Dumas précisément mais de façon moins habile, de placer le lecteur non dans l'action mais comme un simple spectateur distant, a qui il s'emploie systématiquement, et parfois hélas pesamment, à décrire de façon directe et didactique le contexte historique, la configuration et l'architecture de la ville du Paris de l'époque, (voire même ce qui est plus gênant encore, à expliciter les actions ou réactions des personnages comme s'il s'adressait à un enfant...). Or, plutôt que d'être un enrichissement historique et contextuel, ces informations récurrentes, bien qu'intéressantes en soi, ralentissent considérablement l'action, nuisent à l'imprégnation du lecteur, perturbent la fluidité du récit.
De surcroit, d'innombrables scènes d'action ou de révélation sont laissées en suspens par pure volonté d'effet cliffhanger mal venu qui gâche souvent le plaisir, au contraire de l'effet escompté. Et que dire de certaines redites inutiles et injustifiées (ex : boue puante des rues de Paris, description détaillée des itinéraires...) ?... Comme avec un bruit lancinent dont on découvre l'existence et qui demeure, le lecteur cherche et anticipe ces défauts qui deviennent vite agaçants!
Plus grave sans doute, le manque d'épaisseur psychologique des protagonistes pourtant intéressants bien que restant des classiques du genre.
Après tous ces éléments négatifs, une mauvaise note sans doute ?
Eh bien non.
La sévérité, sans doute un peu forcée, de ces appréciations est en réalité le fruit de la déception car il y avait vraiment matière à prendre un plus grand plaisir encore avec ce livre (et les deux à suivre ?). D'ailleurs, certains l'apprécient beaucoup et je peux le comprendre. Il est vrai qu'au delà de ces défauts qui m'ont gêné, ce vrai-faux roman historique et de fantasy reste original, attachant et riche.
J'hésite entre 6 et 7... Je mets un gros 6 pour conserver une marge de manoeuvre en attendant de découvrir le deuxième tome.
Parmenion
6
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le 14 févr. 2014

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Parmenion

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