Les Pierres sauvages est le journal de bord tenu pendant neuf mois par le maître d'oeuvre de l'abbaye de Thoronet, neuf mois très symboliques car la construction s'est étalée sur plusieurs décennies. On découvre ainsi ce qui a présidé au choix du site ; on suit l'installation du chantier, la séquence des travaux, de la pierre brute extraite de la carrière à la pierre taillée et placée sur l'édifice.
Mais plus encore ce sont les méditations, les interrogations, les calculs et les arbitrages du maître d'oeuvre qui constituent la matière de ce dense roman que Fernand Pouillon a écrit au moment où, mis en cause dans l'affaire des logements du Point du Jour de Boulogne, il séjourne en prison. La complexité de la construction, les combats qu'il faut mener avec les éléments, le sol, l'eau, le temps qu'il fait, sont parfaitement rendus, ainsi que les difficultés d'organisation de la vie d'une équipe, abbé, prieur, moines et convers. Fernand Pouillon, au-delà de ses savoirs d'architecte, s'appuie sur une connaissance très documentée, érudite, de l'édification de l'abbaye.
Le récit est dense, trop parfois, et j'ai été plusieurs fois (souvent) lassé par de longues pages sans respiration, par manque de paragraphes. A tel point que j'ai interrompu ma lecture pendant plusieurs mois avant de la reprendre. J'avais visité Le Thoronet il y a quelques années ; j'ai néanmoins voulu aller jusqu'à la conclusion pour en savoir plus sur ce joyau des abbayes cisterciennes.
Les Pierres sauvages est un roman exigeant dont on ne regrette pas la lecture mais à laquelle il vaut mieux se préparer.