Le style vif et le verbe saisissant de von Salomon nous plongent dans la révolte d’une jeunesse contre la bourgeoisie, contre l’état, contre les « honnêtes gens ». Avec fougue et rage il dépeint ses luttes sur les rives de la Baltiques, sa haine des esprits tièdes et frileux, son combat contre ceux qui l’ont abandonné, banni, réprouvé. Aux récits des combats de ces irréductibles succèdent les réflexions d’une jeunesse en ébullition, sur l’histoire, l’Allemagne, l’avenir de l’Europe. Et à la quête désespérée de ces orphelins de l’empire effondré, succède le châtiment, l’incarcération où l’auteur raconte sa lutte contre son ennui, contre ses hantises, et contre la plus grande de toutes : la peur de devenir peu à peu ce qu’il a combattu, de devenir « un honnête homme ». De ce voyage à travers un Reich déchiré, aux cotés d’une génération perdue, oubliée de tous et même d’elle-même, bien des idées reçues et des représentations sur l’entre-deux-guerres ne ressortent pas indemnes. Les chapitres se succèdent et nous arpentons, avec von Salomon, des villes, des territoires (aujourd’hui hors des frontières de l’actuelle Allemagne), pour lesquels l’auteur livre un combat perdu d’avance, pour une Allemagne qu’ils entendaient, lui et ses semblables, bâtir, inventer, penser. Car ce livre n’est pas seulement l’autobiographie d’un activiste nationaliste qui se bornerait à retracer son parcours de combattant et de comploteur. C’est aussi l’étonnant voyage intellectuel d’un enfant d’Allemagne, dont le nationalisme a côtoyé le communisme des uns, l’anarchisme et le bolchévisme des autres, dans un magma politique ayant pour seul dénominateur commun la remise en cause de l’ordre établi.
Gwendal_Piégais
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Créée

le 28 mai 2014

Modifiée

le 28 mai 2014

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