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Martinez pour conquérir son public ce soir là, tandis qu’elle venait rencontrer ses lecteurs – à vrai dire essentiellement des lectrices – dans la plus que charmante librairie Trait d’Union, sur l’île de Noirmoutier. C’est dans la rue, masqués et suffisamment espacés, que nous nous sommes laissés embarquer dans son récit : celui de son écriture, d’abord, puis la genèse de ce roman particulier, ensuite. Ses talents d’oratrice, de conteuse, n’ont rien à envier à ses talents d’autrice. En quelques mots, elle réussit à déclencher l’hilarité lorsqu’elle raconte sa bataille de haute volée – mais semble-t-il perdue d’avance – avec les immenses fougères qui envahissent son jardin.


Dans ce roman, Carole Martinez incarne un personnage de l’histoire, celui d’une écrivaine. Évidemment, elle nous laisse toute la liberté d’imaginer qu’il puisse s’agir d’elle ou non (cette liberté du lecteur sur la lecture est d’ailleurs l’objet d’un court chapitre), mais j’ai fait le choix de faire de voyage littéraire avec elle à mes côtés, glissée comme une présence chaleureuse au fil des pages.


C’est en Bretagne qu’une autrice vient chercher le calme et l’inspiration nécessaire à l’écriture de son prochain roman, une histoire revisitée autour de Barbe Bleue. Dans ce petit village si charmant mais étonnant, elle rencontrera Lola au bureau de poste, où elle vit et travaille. Lola est une jeune femme simple et célibataire qui occupe son temps libre dans son jardin, y trouvant là le plaisir simple de ne pas avoir à le chercher ailleurs. Dans une armoire héritée de sa famille, elle garde précieusement les cœurs cousus de ses aïeules. Il s’agit d’une tradition espagnole qui veut que, lorsqu’une femme est au crépuscule de sa vie, elle écrive ses secrets sur des petits bouts de papiers qu’elle enferme ensuite dans un cœur brodé dont sa fille héritera sans jamais chercher à violer les secrets de ce cœur cousu.


Mais un jour, on ne sait pas trop comment, un des cœurs s’ouvre et les secrets d’Inès Dolorès jaillissent de son cœur usé : la tentation sera trop grande pour Lola de s’intéresser aux secrets du passé de sa famille. C’est ainsi qu’elle proposera à cette autrice de passage qui a eu le bon goût de publier un précédent roman parfaitement adapté, Le cœur cousu, et dont le nom sonne espagnol, de l’aider à traduire l’histoire d’Inès Dolorès. Libre à elle d’utiliser ces morceaux de vie dans l’un de ses romans.


Nous embarquons alors pour un voyage extraordinaire où passé et présent s’entremêlent. C’est un roman sur l’amour, la passion, les déchirements, sur la folie aussi, un peu. On y respire le parfum enivrant de ces roses fauves qui semblent dotées de pouvoir surnaturel, qui poussent à l’érotisme, à la lubricité. Il y a des espoirs, des déceptions, de belles rencontres et des séparations douloureuses. Si j’ai été un peu perdu sur la fin du roman, j’ai néanmoins adoré ce voyage atypique sous la plume toujours aussi belle de Carole Martinez, comme une sorte de rêve un peu nébuleux.


Les roses fauves, de Carole Martinez, a paru aux éditions Gallimard le 20 août 2020.

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le 30 août 2020

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Brice B

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