L’Argentine. C’est elle le vrai personnage principal de ce thriller politique. Un pays dont l’Histoire récente a taillé des balafres à coup de haine qui continuent à saigner chez les gens ordinaires. Et c’est cette Histoire macabre qui m’a accroché pendant les trois-quarts du roman. La dictature, une violence implacable, subie tous les jours par tous les citoyens, au gré du défilé des militaires aux manettes, des putschistes, des pouvoirs corrompus, des purges, des enlèvements, des tortures, de souffrances, d’assassinats et de l’injustice arbitraire…Hommes ordinaires, utopistes, militants, poètes, familles, femmes, enfants, nourrissons…On a la juste impression qu’on peut multiplier à l’infini des histoires de survie sans espoir et d’assassinés de souffrance. La noirceur est d’autant plus profonde que la véracité est historique.
La trame policière, somme toute un clone classique et prévisible, reste assez intriguant pour éviter la narcoplexie. Elle supplante progressivement les descriptions historiques; dommage, on finit donc sur une certaine déception. Les personnages souffrent d’une certaine caricature et parfois les ficelles sont aussi grosses que des cordes. Ma méchanceté n’y est pour rien, mais on se retrouve tout de même parfois avec des images de téléfilms dégoulinant sur le réseau câblé.
L’écriture, par sa sobriété fait une description assez crue et poignante de toute la partie historique et rend la cruauté insupportable et ordinaire, telle que subie par les Argentins. Mais devient assez banale, se complaisant à des clichés au cours des parties policières. Le texte respire par certaines répliques d’humour intelligent.
Pour ainsi dire, sans vouloir faire de moral et de leçon, je réserverais ce roman à tous les bourrus qui réclament la force du pouvoir en oubliant le coût pour la démocratie et la justice.
Une phrase du livre : "La cruauté de l'Homme n'a pas de limites". et répétée deux fois. La citation ne prétend pas côtoyer les littérairement mémorables, mais ça prend tout son sens dans l’Histoire.