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Mémoires
7.6
Mémoires

livre de Raymond Aron (1983)

(Lu dans l'édition presses Pocket en deux tomes)


Je l'ai enfin lu, ce monument que tout étudiant en histoire et à Science-Po se voit recommander à un moment de son cursus. 1100 pages, qui se lisent assez vite.


A la lecture, on ne peut que déplorer qu'il n'y ait que les universitaires qui écrivent des mémoires si détaillés. J'ai eu la même sensation, en plus intense, qu'en lisant les mémoires d'Eric Hobsbawn (même génération, autre bord politique) : un intérêt moindre dès qu'on commence à toucher à des histoires d'universitaires. Et ici, vous en trouverez beaucoup. Bien sûr, vous trouverez des anlayses fines sur la stratégie de De Gaulle, pendant la guerre et dans la vie politique d'après-guerre, sur la guerre des six jours, et beaucoup, beaucoup de notations sur l'aveuglement des intellectuels français face au communisme, le tout sous la forme d'analyses cliniques plutôt que sous forme d'opinions - la marque de fabrique d'Aron. L'auteur fournit aussi des détails biographiques, qu'il assortit toujours d'un commentaire sociologique : sur ses origines juives, sur sa position atypique, à mi-chemin entre le journaliste, l'essayiste, l'universitaire et le conférencier.


L'ouvrage a une force et une faiblesse : c'est une sorte de rétrospective d'Aron sur son oeuvre. Par conséquent certains chapitres suivent un schéma récurrent en se centrant sur une oeuvre d'Aron. Il explique d'abord les circonstances dans lesquelles il a écrit cette oeuvre, en résume les lignes de force, puis revient sur le retentissement de l'ouvrage. En gros, Aron fournit une fiche de lecture de tel livre et cite les passages marquants des lettres qu'il reçut ou des critiques qui sortirent dans des oeuvres. C'est intéressant dans la mesure où cela vous fournit un condensé de l'oeuvre d'Aron, mais au bout d'un moment il y a une certaine absence de surprise, voire quelques répétitions entre le tome 1 et le tome 2. Disons que l'intérêt va décroissant.


Les convictions d'Aron sont au fond simples : atlantisme, démocratie libérale qui n'exclut pas du keynesianisme et de la régulation. A noter deux grands absents dans les thèmes qu'il aborde : le féminisme et surtout l'écologie. A le lire, on sent bien qu'on se situe dans un XXe siècle où les questions de réchauffement climatique, d'épuisement des ressources ne se posaient pas.


A noter en fin de volume 2 un index pratique des noms cités. Sans surprise, Sartre et De Gaulle l'emportent de loin.


Allez, notes de lecture.


I - L'éducation politique.
1 - le testament de mon père

Souvenirs du milieu familial. Le frère Adrien, joueur de tennis, de bridge et collectionneur de timbres. Le père, agrégé de droit, qui aurait rêvé d'un cursus brillant, dépensier et ruiné par la crise de 1929. Les premiers professeurs, le lycée à Descartes. Son frère Robert, qui devint analyste financier. La mort du père, d'une crise cardiaque, en 1934.


2 -Etudes et amitiés
La khâgne à Condorcet. L'émerveillement en arrivant à Ulm. Sartre et Nizan. L'agrégation, où il arrive premier (Sartre la rate par anticonformisme et l'obtient haut la main l'année suivante). Influence de Léon Brunschvicg, de Kant et du positivisme. Portrait du pacifisme d'Alain et de son cénacle. Canguilhem, Pierre Guille, Lucien Herr. Un Aron plus politisé que Sartre et Nizan à l'époque, qui correspondait au renouveau de la gauche (1924). Inscription à la SFIO. Tennis.


3 - Découverte de l'Allemagne.
Envie de ne pas rester dans le bocal du Quartier Latin. En 1930, poste d'assistant à Cologne, auprès de Leo Spitzer. Epiphanie sur le fait que notre perception de l'Histoire est toujours influencée par les conditions de notre époque. 1e lecture du Capital. Observation (sans avoir soi-même été victime d'antisémitisme) de la montée du nazisme, de sa défaite aux élections de 1932. Témoin d'un autodafé, beaucoup moins spectaculaire que ce que les images montrent. Article contre Hitler. Découverte de Weber, Husserl (qu'il fit connaître de façon décisive à Sartre), Heidegger. Derniers feux du cinéma et du théâtre de Weimar. Diffusion du sentiment de peur. Contacts à la NRF, participation aux décades de Pontigny. Rencontres avec Malraux, Roger Martin du Gard, Simone Weil (sur lequel on entend quelques vérités difficile à dire aujourd'hui), et avec sa future épouse, Suzanne Gauchon. Echec de la réconciliation franco-allemande


4 - Au coeur du Quartier latin.
Unique année d'enseignement en lycée, au Hâvre. Sentiment de ne pouvoir reprendre cette routine une année de plus. Travail au Centre de Documentation Sociale de l'ENS. Prise de position sur sa judéité : ne pas la cacher, sans la revendiquer de manière ostentatoire. Célestin Bouglé. Epistémologie et école de Francfort. Nizan devient communiste, Sartre devient distant après sa rencontre avec Beauvoir. Malraux compagnon de route communiste. Portraits d'Alexandre Koyré, Eric Weil et Alexandre Kojève. Panorama : Maurrase, Mounier (qu'Aron n'aime pas).


5 - "Désespéré ou satanique".
Soutenance de thèse, où Fauconnet jète ces mots à la figure d'Aron. Travail devenu La sociologie allemande contemporaine. Beaucoup d'épistémologie indigeste, qui intéressera surtout ceux qui veulent puiser aux sources de la pensée d'Aron. A l'époque, l'usage de ces auteurs allemands peu connus, qui remettent en cause la sociologie durkheimienne, passe mal en France. Idem pour la Philosophie critique de l'Histoire. Très conceptuel. Lettres de félicitation de Bergson (peu avant sa mort) et de Jean Cavaillès.


6 - Le chemin de la catastrophe.
Analyse étonnante attribuant le Front Populaire au seul refus de Flandin et Laval de dévaluer le franc. Attitude passive face à l'invasion de l'Ethiopie, puis le réarmement de la Rhénanie (plus grave que Munich, pour Aron). Manque de conscience des enjeux par les universitaires pacifistes comme Brunschvicq. Blum comme Maurras étaient pacifistes. Conscience que le programme du Front Populaire était inapplicable. Défense de Munich comme d'un sursis nécessaire. Scepticisme lors d'un passage à la SDN. Obsession de sauver la France du déclin. Charge de cours, en 1937-38, à l'université de Bordeaux. Réflexions sur la montée du totalitarisme et ce qu'on entend par révolution (passes d'armes avec Victor Basch). Anticommunisme croissant d'Aron, confirmé par le pacte avec l'Allemagne.


II - La tentation de la politique (1939-1955).
7 - La guerre.


8 - L'illusion sans lyrisme.


9 - Journaliste et militant.


10 - Le partage de l'Europe.


11 - Les guerres du XXe siècle.


12 - L'opium des intellectuels.


III - Un professeur dans la tourmente (1955-1969).
13 - Retour à la vieille Sorbonne.


14 - La tragédie algérienne.


15 - La société industrielle.


16 - Le grand dessein du Général.


17 - Paix et guerre.


18 - "Il ne nous a pas compris".


19 - "Sûr de soi et dominateur".


IV - Les années du mandarin (1969-1977).
20 - De Pierre Brisson à Robert Hersant.


21 - Le post-gaullisme.


22 - De la critique idéologique.
a - les structures de la foule.


b - Débats par procuration.


23 - Henry Kissinger et la fin de l'hégémonie américaine.


24 - De la critique historique.
a - république impériale.


b - Clausewitz.


25 - La décadence de l'Occident.


V - Le sursis (1977-1982)
1 - L'embolie.


2 - L'express.


3 - La fin d'une génération.

zardoz6704
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le 30 août 2018

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