Vic est une enfant qui adore se balader sur son beau vélo tout neuf. Il faut dire qu’avec des parents qui s’engueulent tout le temps, c’est normal. Lorsque sa mère pique encore une crise parce qu’elle a égaré son bracelet, Vic s’enfuit à nouveau. Ses roues la mènent à un pont effondré qui surplombait une rivière. Mais, lorsqu’elle l’atteint, l’édifice est toujours là. Et, de l’autre côté, une réalité impossible l’attend.
Joe Hill est le fils de Stephen King et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a hérité du talent de papa. Nosfera2 est son troisième roman, et mérite amplement son succès.
Avant tout, il faut mentionner que la traduction du titre est une fois encore imbécile, car elle conserve la prononciation anglaise. À ce niveau, il aurait fallu garder le titre américain, NOS4A2.
Ce roman cherche l’originalité avec un découpage en chapitres très inégaux (certains ne font qu’une ligne). Quant à leur titre, il s’agit invariablement de lieux, qui s’insèrent parfois dans la phrase du chapitre précédent. Enfin, des illustrations de Gabriel Rodriguez, dessinateur et ami de Joe Hill, parsèment le texte et séparent les paragraphes.
Le scénario est ciselé. Joe Hill monte méticuleusement l’intrigue, organise posément ses scènes horrifiques, et pousse le talent jusqu’à dérouler la vie entière de ses personnages. Son monde foisonne de détails, notamment au niveau de l’évolution technologique entre les années 90 et les années 2000, avec également les artistes en vogue de ces époques. Ce travail de recherche en lui-même est remarquable. Comme tout grand écrivain, l’auteur déroule une galerie de personnages à l’humanité parfois insoutenable et joue avec, à la manière d’un gamin qui arrache les ailes d’une mouche. C’est rude, mais le plus souvent triste.
Car oui, à la différence de son père, Joe Hill exprime essentiellement de la tristesse. Là où Stephen King exposait un sadisme cru, et la souffrance dans l’horreur, son fils peint du désespoir, notamment au travers des personnages féminins. Entre l’héroïne, sa mère et son amie bibliothécaire, le concours de destins sinistres est très serré. La fin tente d’égayer tout cela, mais tombe un peu comme un cheveu sur la soupe
notamment la romance avec Tabitha, parachutée sans préavis.
Par ailleurs, les explications sur le principe du fantastique sont un peu légères et j’ai peiné à comprendre le fonctionnement de ces univers imaginaires. Peut-être suis-je trop scientifique pour cela.
À noter également le clin d’œil à Locke & Key dans le texte comme sur la carte avec la serrure dans la ville de Lovecraft. Ce comics a été scénarisé par l'auteur et illustré par son ami dessinateur.
Nosfera2 est un livre horriblement bon. Plus accessible que l’épouvante sadique de Stephen King, il développe une intrigue passionnante et très prenante. L’auteur parvient à tenir le lecteur en haleine jusqu’à la fin, et poursuit même les explications après le dénouement. Le talent de Joe Hill est maintenant reconnu, et il est très plaisant de savourer une de ses œuvres d’art.