Pedro Páramo
7.3
Pedro Páramo

livre de Juan Rulfo (1955)

« Surtout, ne lui réclame rien. N'exige que notre dû. Ce qu'il me devait et ne m'a jamais donné... L'oubli dans lequel il nous a laissés, fais-le lui payer, mon enfant. » Juan Preciado promet à sa mère, sur son lit de mort, de retrouver Pedro Paramo, son père qui les a autrefois abandonnés. En route pour Comala, il croise un homme sur un âne qui le mène jusque dans les rues désertes du village. Là, une vieille femme lui apprend que celui qui l'a accompagné est mort depuis longtemps, comme Pedro Paramo, dont il peut distinguer, au loin, les ruines de l'immense propriété. Car le père de Juan était l'homme fort de la région. Cruel, despotique, semant derrière lui autant de morts que d'enfants, il était haï et craint de tous. Au cours de son séjour, Juan va croiser d'autres fantômes, autant d'âmes vagabondes venues lui raconter par bribes l'histoire du village s'entrecroisant avec celle de son géniteur.

Voila un roman d'une infinie complexité tant il bouleverse les codes de compréhension classiques d'un récit de fiction. Juan Rulfo aurait déclaré que son texte nécessite la « coopération » du lecteur. Difficile en effet de suivre le déroulement d'une intrigue sans aucune linéarité, où les différentes temporalités s'enchevêtrent et où les morts et les vivants ne cessent de dialoguer. Pour Carlos Fuentes, « L’œuvre de Juan Rulfo n’est pas seulement la plus haute expression à laquelle soit parvenu, jusqu’à maintenant, le roman mexicain : à travers Pedro Páramo, nous pouvons trouver le fil qui nous conduit au nouveau roman latino-américain. »

Un texte déstabilisant, à prendre selon moi comme une expérience de lecture unique, la découverte d'une construction narrative totalement novatrice. Un texte auquel il ne faut surtout pas essayer de résister mais au contraire devant lequel il est indispensable de lâcher prise pour se laisser entraîner dans les méandres de la mémoire d'un village pauvre et reculé.

Au final il me restera de ce récit polyphonique les voix et les histoires si étranges de personnages en quête, au-delà de la mort, d'une paix intérieure à jamais inaccessible. Troublant et vertigineux.
jerome60
7
Écrit par

Créée

le 7 juil. 2014

Critique lue 735 fois

jerome60

Écrit par

Critique lue 735 fois

4

D'autres avis sur Pedro Páramo

Pedro Páramo

Pedro Páramo

le 29 avr. 2014

D'une tombe l'autre

Pedro Paramo, un roman unique et l'unique roman de son auteur. Pedro Paramo laisse songeur. Ici, le temps semble s'écouler au ralenti, peut-être même à rebours, si bien qu'il conviendrait presque...

Pedro Páramo

Pedro Páramo

le 20 août 2015

Critique de Pedro Páramo par GrandGousierGuerin

« Je suis venu à Comala parce que j’ai appris que mon père, un certain Pedro Paramo, y vivait. C’est ma mère qui me l’a dit. Et je lui ai promis d’aller le voir quand elle serait morte. J’ai pressé...

Pedro Páramo

Pedro Páramo

le 7 juil. 2014

Critique de Pedro Páramo par jerome60

« Surtout, ne lui réclame rien. N'exige que notre dû. Ce qu'il me devait et ne m'a jamais donné... L'oubli dans lequel il nous a laissés, fais-le lui payer, mon enfant. » Juan Preciado promet à sa...

Du même critique

Dans les forêts de Sibérie

Dans les forêts de Sibérie

le 17 déc. 2011

http://litterature-a-blog.blogspot.com/2011/12/dans-les-forets-de-siberie-calendrier.html

Sylvain Tesson s'est fait un serment : avant ses 40 ans, il vivra plusieurs mois dans une cabane. Direction donc le fin fond de la Russie, sur les bords du lac Baïkal. De février à juillet 2010,...

Le Guide du mauvais père, tome 1

Le Guide du mauvais père, tome 1

le 5 janv. 2013

Critique de Le Guide du mauvais père, tome 1 par jerome60

- Papa ! C'est quoi la pénétration ? - La pénétration c'est quand le monsieur est sexuellement excité et que son pénis devient tout dur. Ça s'appelle une érection. Ensuite le monsieur fait entrer son...

Notre besoin de consolation est impossible à rassasier

Notre besoin de consolation est impossible à rassasier

le 13 avr. 2012

http://litterature-a-blog.blogspot.fr/2012/04/notre-besoin-de-consolation-est.html

« Je suis dépourvu de foi et ne puis donc être heureux, car un homme qui risque de craindre que sa vie ne soit une errance absurde vers une mort certaine ne peut être heureux ». Ainsi commence cet...