A l’automne 1937, Kristina Tacker est internée. Elle trouve une petite ouverture et s’enfuit. Mais elle ne peut aller bien loin.
Et lors de son « escapade », elle se rappelle de l’homme qui était son mari. Pourtant, depuis 12 ans, elle reste un secret pour ses médecins et les infirmiers, car elle ne parle plus.
23 ans plus tôt, nous sommes à l’aube de la guerre de 1914, son mari part. Toujours solitaire, il dort avec sa sonde nuit après nuit. Il doit relever les fonds marins afin que les bateaux suédois puissent trouver des routes sûres. Et pendant ce voyage, top secret, il accostera sur une île pratiquement inhabitée et il rencontrera une femme, qu’il va épier pendant de nombreuses heures.
Ce n’est ni un polar, ni un thriller. Mais c’est un auteur suédois. Les auteurs suédois, j’aime beaucoup comme ils écrivent. Ils décrivent la vie telle qu’elle se passe. Et surtout une vie où il fait beaucoup plus froid que chez nous et est-ce que le froid exacerbe les sentiments ? Je ne sais pas. En tous les cas, les auteurs suédois ont une capacité monumentale à décrire la vie et le caractère des gens.
Et la vie c’est la vie et le caractère d’un homme. D’un homme qui est en train de vivre le début de la guerre de 1914. Au fil des pages, on en sait plus sur le caractère de Lars. Plus jeune, il épiait constamment les siens, et il continue avec sa femme. Mais chez lui, il ne se sent pas à l’aise. Se sent-il épié par toutes les petites statues de sa femme ? C’est également un homme violent qui essaie de contenir sa violence, mais pas toujours, puisqu’il y aura la mort. C’est un homme qui, lorsqu’il a décidé quelque chose, tente par tous les moyens d’y parvenir, au mépris de son travail, de son mariage, des lois.
Il a appris à vivre comme un fantôme et son travail de repérage des fonds marins peut s’apparenter à ça. Son travail est toute sa vie et tant qu’il n’aura pas trouvé le fond (mais quel fond ?), sa vie n’aboutira pas. La vie de Lars ne se trouve être qu’une vie de mensonge et il entretiendra ses mensonges. C’est un homme qui fait preuve de beaucoup de sang-froid pour mentir, pour tuer. Et le premier meurtre sera la suite d’autres meurtres. Cet homme est manipulateur. Avec son souci du contrôle, il n’arrive pas à contrôler sa propre vie. On a l’impression qu’il aime sa femme (son parfum qu’il tente de recréer en est la preuve). Mais lorsqu’il rencontre une autre femme, c’est le désir qui prime avant l’amour. Et l’amour naît. Et le mensonge également. Et là, tout s’enchaîne. Deux enfants, deux femmes. Deux filles et le même prénom.
Lars tente, certaines fois, de reprendre pied, mais son naturel revient vite au galop. Et il finira seul sur cet île. Seul comme il l’a toujours été depuis qu’il est enfant.
On peut se demander pourquoi l’auteur commence par la femme de Lars. Mais tout trouve sa logique dans le déroulement des faits et la fin nous apprendra pourquoi elle est enfermée depuis tant d’années. Sa femme, c’est vrai, je n’en ai parlé. On peut penser qu’elle est insignifiante. Au contraire, je trouve qu’elle vit sa vie et qu’elle semble accepter tous les départs de son mari, sans poser de questions. De toute façon, c’est top secret. Mais elle est très forte puisqu’elle arrive à le retrouve. Elle accepte même cette autre femme, mais le coup porté lui est tout de même fatal. Elle trouvera tout de même une alliée avec l’amante de son mari, qui en définitive, la rapatriera en ville pour qu’elle puisse trouver les soins appropriés à son état.
La Suède est un pays froid. Et l’auteur nous parle du souffle du vent, partout. Même les immeubles respirent. Le brouillard, l’eau, la glace ont une place très importante dans ce roman. Le brouillard, tout comme la glace, n’empêcheront pas Lars de rejoindre son île.
Si vous aimez les ambiances un peu froides, où il y a très peu d’action, où l’humain, son comportement, son caractère et ses actions sont étudiées à fond, je vous conseille ce roman. De prime abord, si on connaît peu la littérature suédoise, on peut être surpris, mais quand on y a goûté, on apprécie les mots et surtout la vie qu’ils décrivent. Car tout n’est pas rose, chez eux.
Angélita
7
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le 11 nov. 2012

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