Racée
5.7
Racée

livre de Rachel Kahn ()

Un pamphlet virulent contre la « pensée unique » de l’extrême-gauche, et notamment les études décoloniales et la mouvance des Indigènes de la République, qui en prennent pour leur grade tout au long du texte, au nom des valeurs « universelles » de la République.
L’autrice commence par se présenter comme une « afro-yiddish », gambienne par son père et juive par sa mère, qui fait cohabiter en elle de nombreuses identités, non seulement par ses origines mais aussi par ses différentes expériences de vie : ex-athlète de haut niveau, elle est aussi juriste, danseuse de hip-hop, conseillère politique, actrice et désormais écrivaine. Autant de casquettes qui la rendent impossibles à ranger dans une case unique – elle qui, en lectrice assidue de Romain Gary, voudrait que ses identités « s’additionnent » pour devenir « liberté et non enfermement ».
L’autrice revient ensuite sur la publication de Noire n’est pas mon métier, un livre collectif auquel elle a participé, et qui dénonce le fait que les actrices noires, dans le cinéma français, sont constamment réduites à des stéréotypes, de la nounou à la prostituée sans papier. Mais suite à cet ouvrage, Rachel Kahn est entrée en conflit avec d’autres autrices du livre, qui l’accusaient de « pactiser avec l’ennemi », comprendre la gauchiasse. De là, son envie de régler ses comptes.
Tout particulièrement, Rachel Kahn refuse le vocabulaire de la gauche : elle dénonce d’abord l’écriture inclusive, qui aurait pour conséquence de « séparer » les hommes et les femmes, puis elle s’attaque ensuite au concept de « racisé » qu’elle trouve extrêmement réducteur pour ceux auxquels il est accolé. Elle lui préfère le terme de « racé », qui donne son titre à cet essai et qu’elle associe aux différentes « racines » qui sont les siennes. C’est ensuite toute une terminologie que vilipende l’auteure, de « afro-américain » à « minorités » autant de termes qui seraient un moyen de « victimiser » à l’excès ceux qui se considèrent comme discriminés.
L’un des chevaux de bataille de l’autrice est également d’épingler la langue de bois du monde politique, qui fait un usage immodéré du « collectif », du « vivre-ensemble », de la « diversité » et de la « mixité sociale ». Pour développer ses idées, Rachel Kahn cite abondamment Romain Gary mais fait aussi appel à la pensée de Raphaël Enthoven et de Jean-François Kahn (directeur de Marianne), et dans un autre registre, Aimé Césaire, Edouard Glissant, et même Victor Hugo et Albert Camus.
Enfin, dans une dernière partie, Rachel Kahn expose des mots qui lui tiennent à cœur, de « intimité » à « silence », en passant par « création », « désir » ou « signature ». Le registre de cette dernière partie est plus poétique, les considérations politiques y alternent avec les envolées lyriques, mais l’objectif est toujours de dénoncer les « manœuvres des identitaires », et « l’intensification du repli » en France. Des expressions dans lesquelles on retrouve la préoccupation politique de lutter contre le communautarisme. Et effectivement, en conclusion, Rachel Kahn défend avec vigueur la « loi contre les séparatismes » du gouvernement actuel. Super...

Courfeyrac
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le 6 sept. 2022

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Racée
MarieEdwina
9

Pas de repentance ni de haine

Agréable à lire, poétique, j'apprécie la manière dont l'auteur manie les mots.

le 2 août 2021

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