Alliance avec le peuple castor

Après avoir brillamment traité de notre relation conflictuelle avec le retour du sauvage à crocs (le loup) dans Les Diplomates et Sur La Piste Animale, puis avoir proposé des réflexions plus globales dans Manières d'être vivant, l'écrivain et philosophe Baptiste Morizot se plonge désormais corps et âme dans le réseau de vie qui sillonne nos paysages, abreuve notre terre et tisse ces inaltérables (?) cordons de vie reliant nos bribes de terres naturelles morcelées entre elles. Et qui dit rivière, dit forcément castor, Morizot l'a bien compris.

Beaucoup trop chassé, il dérangeait, amenait du désordre, si bien que les balles ont bien failli le faire disparaitre de nos territoires. Ici comme ailleurs, l'architecte du paysage est passé à un cheveu de l'extinction. Pourtant, ce qu'il propose à la force de ses incisives, c'est une manière totalement nouvelle de penser la "renaturation" de nos rivières. De canaux bons à emporter nos égoûts à ces cordons sinueux portant la vie, l'étrange rongeur abat (c'est le cas de le dire) un travail considérable. Derrière lui, c'est un véritable cortège d'espèces menacées qui retrouve un second souffle grâce au passage du castor.

L'animal permet aussi (et c'est d'autant plus intéressant) de créer de nouvelles manières d'influer sur le vivant. Si les ingénieurs se cassent longtemps la tête pour redonner de la place aux cours d'eau (souvent pour des questions de protection contre les crues, bien que les bienfaits écologiques de tels travaux soient indéniables), s'inspirer de la nature est souvent la manière la plus efficace (et économique) de s'y atteler. Une récente vidéo avec Baptiste Morizot le met par ailleurs en images en manière assez passionnante : https://youtu.be/fyP2Pdnutrw?si=c0NbgypcYZOvYUvp .

Une vidéo teaser pour le livre de Baptiste Morizot, dans lequel on creusera la question bien plus profondément. De l'histoire de l'espèce aux services écosystémiques qu'il déploie, le bouquin est une véritable mine d'or pour quiconque s'intéresse de près ou de loin à la renaturation et à la vie sauvage. Technique sans jamais être barbant, philosophie en tenant le pari de ne jamais être plombant, Rendre l'eau à la terre est un bouquin passionnant. Cerise sur le gâteau, c'est un objet assez sublime, tiré sur un papier soyeux qui met en valeur les splendides aquarelles de Suzanne Husky qui accompagnent les textes du philosophe.

Bref, vous l'aurez compris, un livre à ne surtout pas manquer, et une association (MAPCa) à soutenir !