"La littérature doit, soit enrichir l'esprit, soit le bouleverser."

Si vous recherchez la douceur ouatée de souvenirs enfantins, l’expression de la nostalgie d’une époque ou la délicatesse d’une plume, vous ne les trouverez pas ici. Ce que nous livre ici Calaferte n’est pas une belle histoire, c’est un combat, une lutte pour et contre la Vie.

Paru en 1952, le « Requiem Des Innocents » est son premier ouvrage. Autobiographie, il y décrit le quotidien de ses jeunes années d’immigré italien dans la banlieue pauvre de Lyon. Désavoué avec virulence par son auteur vingt-cinq ans plus tard, il n’en reste pas moins l’un des titres phare (et le meilleur à mes yeux) de sa bibliographie.

Et quelle brutalité, quelle violence sourde dans ces pages… Toute la noirceur de l’Humanité y est racontée avec des mots crus qui viennent heurter le lecteur de plein fouet, le trainant sans ménagement jusqu’à cette « Zone » où l’alcool, l’errance, le sexe et la souffrance mènent la danse, et où chaque protagoniste est à la fois bourreau et victime.

La langue y est à l’image du reste, dure, venue de l’estomac autant que de la plume, et jetée sur le papier avec une certaine forme d’acharnement et de désespoir. Oui, tout dans ces lignes tient du hurlement, du cri de révolte, de la volonté féroce de se tirer de là et d’échapper à un destin miséreux. Et pourtant, au milieu de toute cette acidité, une fragilité enfantine et pathétique parvient parfois à filtrer et à vous toucher au cœur, donnant au livre un relief vertigineux.

Calaferte est pour moi l’un des auteurs les plus marquants, toutes périodes confondues, et ce Monsieur mérite largement d’être d’avantage popularisé. Alors si vous avez envie de quelque chose de différent, ruez vous sur ce Requiem !