Alors qu’il rentre de ses vacances d’été avec sa femme, Blanche, et leurs deux enfants, Etienne apprend par la radio la mort de Jean-Jacques Goldman. Une déflagration pour le quadragénaire pour qui le chanteur était une véritable idole. Et l’onde de choc semble se propager à l’ensemble de la vie d’Etienne qui prend, dès son retour dans l’appartement familial de Lyon, une tournure dramatique. Au point que le fil de la communication parait irrémédiablement se rompre entre lui et sa famille et que sa vie, jusqu’à présent faite d’une routine rassurante, va peu à peu se déliter.
Chronique d’un drame annoncé, ce livre d’un peu plus de 200 pages nous conduit inexorablement vers une chute. On la pressent dans la manière qu’ont les choses de devenir incontrôlables autour d’Etienne, dans la façon dont il paraît devenir transparent aux yeux de sa femme et de ses adolescents d’enfants, et dont il perd pied petit à petit aussi bien professionnellement que personnellement.
C’est insidieux, sournois. Petit à petit, Etienne se rend compte que cela fait un moment que tout lui échappe. Il n’est même pas capable de mettre un visage sur le nom de certains de ses collègues, ses enfants et sa femme paraissent avoir une relation en dehors de lui dans laquelle ils se racontent des choses personnelles auxquelles Etienne n’a pas du tout accès. Depuis quand est-il ainsi déconnecté des autres, hors de leur monde ? Quand sont apparues les fissures dans la vie bien rangée qu’il s’est bâti, tranquille, sans aspérités, “sans drame, sans larmes” comme chantais son chanteur préféré ?
Etienne va ainsi lentement sombrer sous nos yeux. Alors que son fils se découvre une passion religieuse, que sa fille entretient une liaison avec un homme beaucoup plus âgé et que sa femme organise sa vie autour d’un chien de garde sensé la protéger d’une impression de danger qu’elle éprouve, Etienne lui, ne trouve plus de sens à rien. La vacuité de sa vie va lui apparaître et l’entraîner dans les profondeurs de noires pensées.
Dans ce récit tragi-comique Aurélien Delsaux, dresse le portrait d’un homme face à sa solitude et qui entre en introspection jusqu’au déraillement final. Un homme qui se rend aussi compte qu’il n’est indispensable à personne et que la vie qu’il a mené jusque-là n’avait probablement aucun sens. Faut-il y voir une crise de la quarantaine activée par la mort de l’idole qui nous rappelle à la fois que le temps passe et que nul n’est immortel et qu’il est urgent de profiter de ce que nous offre la vie ? Rien de tel n’est affirmé dans ce récit, mais on peut sans doute lire cela en sous-texte.
En dehors de cela, qui n’est pas une révélation incroyable en soi, et même si le texte est agréable à lire, il y a peu d’aspérités auxquelles s’accrocher pour faire de ce livre un roman mémorable. Et Etienne est un personnage auquel on reste malheureusement assez indifférent.