Le roman est, en gros, divisé en deux parties. La première, où l'équipe du professeur Sevilla tente d'apprendre à communiquer avec les dauphins, et la seconde (annoncée et préparée dans la première) avec l'utilisation militaire des dauphins.


La première partie est vraiment réussie, et m'a intéressée : même si nous sommes dans de la fiction, il y a des éléments réels captivants sur les modes de communication entre dauphins, par exemple, et aussi sur (hypothétiquement) la façon d'apprendre une langue humaine à une espèce animale. Cette première partie plante quelques personnages, et même s'ils ne sont pas inoubliables tous existent, ils ne sont pas juste des noms sur la feuille, on ne se les mélange pas, chacun a un petit quelque chose, chacun a son petit moment dans le livre, et c'est une construction intéressante. Oui, toute cette première partie est plutôt réussie quoi qu'un peu "grosse" par moment (comment les dauphins peuvent-ils, par exemple, acquérir aussi vite la notion du temps humain comme les années, car ils en parlent de leur âge : comme si c'était une notion pour les dauphins, qui n'ont probablement aucune idée du temps défilé, ou du moins du temps défilé vis à vis du calendrier de l'Homme).
Je note, pour finir, que le roman est un peu un assemblage de différents textes dans cette première partie : retranscription d'entretien, compte-rendu, narration simple... c'est plutôt bien fait.


Je suis moins convaincu sur la seconde partie, qui fait de ce livre un roman complètement de son époque, celui de la guerre froide. Alors je n'ai rien contre les romans imprégnés de leur époque, bien entendu, mais à lire actuellement le roman fait un peu daté, vieillot. La peur de la guerre nucléaire plane, et nous voilà dans un univers de sous-marin, d'espionnage militaire etc. Cette partie me semble assez peu logique, tant il est incongru de voir qu'on menace ainsi quelqu'un qui pourrait faire progresser le prestige américain (Sevilla) et la science de ce pays. C'est un peu comme si on avait voulu tuer Neil Armstrong lors de son retour sur Terre. Les raisons sont compréhensibles, mais trop fabriquées à mon avis, et peu crédibles (suis-je naïf ?).


Et le roman fait aussi daté sur pas mal d'autres aspects : les dauphins imaginent l'équipe du scientifique comme "les gentils dieux" tandis que la principale qualité des femmes est leur "douceur" (écrit textuellement dans le roman). Et tout le côté novateur de la première partie finit par être un peu gommée par cet aspect un peu poussiéreux que le roman a dans la seconde partie.


Au final, même si on comprend le propos de l'auteur (l'animal, le progrès scientifique détruit et bafoué au nom de la Guerre), il me semble desservir son roman, qui aurait peut-être pu tout simplement se concentrer sur l'apprentissage d'une langue à une espèce animale, en oubliant toute la partie militaire, qui certes, donne un côté dénonciation à son roman, mais qui me semble finalement alourdir le récit.

Parkko
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le 10 oct. 2020

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Parkko

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