Celui par qui le malheur arrive

Quelques siècles dans notre futur, la terre est régie par un super-ordinateur nommé Uni, qui décide du moindre aspect de la vie de chaque membre : ses études, son travail, le lieu où il ira vivre, s'il a droit d'avoir un enfant, et même, à la base, s'il a le droit de naitre. Avec le but d'un monde parfait où le bonheur est permanent, la maladie absente et l'anormal un mot inconnu, la Famille (l'humanité) s'est créée un maitre absolu, une intelligence supérieure qui la guide vers un destin bien réglé et sans accroc. À l'inverse d'un 1984 et de son système dystopique et coercitif, ce système là est complétement utopique, bien que très autoritaire, car la santé et le bonheur règne pour tous les membres. Mais évidemment, la liberté est devenue un fantôme, et on attends vite du bouquin qu'il nous la ramène.

Un jeune membre surnommé Copeau va se charger de cette tâche. Enfant, son grand-père lui montre le chemin de l'excentricité, et il grandira avec toujours la sensation que quelque chose de caché lui échappe, que la vérité n'est pas celle qu'on lui assène. Jusqu'à ce qu'il comprenne petit à petit tous les rouages de l'immense machination qu'est devenue le monde, et s'arrange pour la dérégler.

Roman d'apprentissage au format assez classique, Un bonheur insoutenable se double d'une anticipation fort bien menée, aux rebondissements efficaces et au suspense croissant. Ira Levin décrit un monde où les hommes sont devenus des pions incapables de recul et de réflexion, les choix dictés par les machines et le cerveau lavé par un culte de la personnalité omniprésent. Il développe les thème de l'intelligence artificielle, de la liberté, de la rébellion, du communisme, en les renouvelant avec talent, pour ce qui devrait déjà être un classique de la SF aux côtés d'Orwell et Huxley.