Il y a quelque temps, ma mère triait ses livres sous mon oeil inquisiteur et elle a refusé de jeter celui-là, qui tombait en lambeaux au point de ne plus pouvoir en lire le titre parce qu'il s'agirait d'un témoignage émanant d'une vague parente de son ex belle-mère.


Je l'ai lu cet après-midi et j'ai très rapidement réalisé que je l'avais en réalité déjà lu il y a dix ou quinze ans de cela. Ce qui m'avait marquée à l'époque, et ce dont je me rappelais donc au fil de ma lecture, c'étaient les mauvais traitements infligés aux déportées, les maladies, la descriptions de quelques morts, bref, les horreurs que l'on sait.


En le lisant aujourd'hui, j'ai apprécié le livre tout autrement. Déjà parce qu'il raconte l'histoire d'un camp exclusivement féminin, "ordinaire", "petit", dans lequel on a finalement de la chance, si l'on peut employer ce terme, de se retrouver; aussi parce qu'il se concentre, spécialement dans la première partie, sur l'organisation véritablement sociale de la vie au camp, ce qui est très intéressant. Ce qui m'a le plus plu, c'est la façon dont l'autrice s'interroge sur ce qui l'a maintenue en vie. Où puiser sa force lorsqu'on voyage au bout de l'enfer ? Au début, très clairement, c'était l'espérance, fondée sur des rumeurs qu'elle savait pourtant fausses mais qu'elle se forçait à croire, évoquant une libération prochaine et un "joyeux retour". Et puis, quand l'espoir s'évanouit, c'est entre autres aux poèmes qu'elle écrit (activité totalement improbable dans un lieu pareil) que M. devra sa survie, car ils lui vaudront quelques cadeaux comestibles, ainsi qu'à des amitiés. C'est également grâce à des actions spontanées et inexplicables (pourquoi elle, et pas une autre ?) de la part de ces déportées montées en grade dans la hiérarchie du camp, dont elle mettra du temps à en comprendre la portée.


Et puis, le récit du retour, les soldats russes joviaux, pleins de bonnes intentions, mais non moins violeurs, la curiosité malsaine des gens, leur gentillesse aussi, qui étonne davantage, la difficulté de se sentir heureux dans un retour à une vie civile qui nous a tant manquée, que l'on a tant idéalisée. Enfin les impensables "regrets" du camp, face à l'impossibilité pour les gens de véritablement comprendre ce qui a pu être vécu, la difficulté de reprendre foi en l'avenir et en l'humanité.


Un récit bouleversant et riche.

Metallichat
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le 10 nov. 2017

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