Critique de Un doux parfum de mort par camor
Un village mexicain, un crime. Le deuil, la vengeance, l'accusé, l'alibi. C'est court et c'est sympa.
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le 15 août 2015
Quelque part dans le Mexique profond, Ramón Castaños tient une sorte de café-épicerie dans le village de Loma Grande. Il est encore relativement jeune et vit plus ou moins sous la coupe de sa mère. Quand survient un drame qui va complètement le dépasser…
Un dimanche matin, tôt, Ramón entend des cris féminins alors qu’il époussète son comptoir. Sorti précipitamment, il découvre le cadavre encore chaud d’une jeune fille qu’il avait déjà remarquée car elle était venue quelques fois acheter des bricoles à sa boutique. Mais c’est un autre témoin qui lui apprend son prénom, Adela, car elle faisait partie des « étrangers » logés à la va-vite un peu à l’extérieur du village. Adela (environ 15 ans), a été poignardée dans le dos. Voyant Ramón s’occuper à masquer la nudité du cadavre, un anonyme parmi les curieux agglutinés autour du corps trouve malin de dire qu’il s’agit de la fiancée de Ramón.
Le jeune homme ne réagissant pas à l’affirmation, celle-ci passe vite pour une vérité établie dont il ne pourra jamais se défaire. Il est ainsi amené à prévenir les parents d’Adela, veiller le corps avec eux, puis à mener l’enterrement. Ramón récupère même une photo de la jeune fille ainsi qu’une liasse de papiers qui ressemblent fort à des lettres d’amour jamais envoyées. Ramón entre donc dans la peau d’un personnage pour justifier ce qui se dit.
Pendant ce temps, les uns et les autres parlent, réfléchissent et complotent. Ainsi les malentendus s’accumulent, car bientôt un témoignage spontané émerge, celui de Ranulfo qui prétend avoir aperçu un couple la nuit précédente. Elle avait un vêtement déchiré et l’homme, qu’on n’a plus revu à Loma Grande depuis, n’était autre que le Gitan. Il n’en faut pas plus pour désigner ce séducteur comme l’assassin d’Adela.
Là où l’auteur fait fort, c’est qu’il s’arrange au cours de sa narration pour nous faire comprendre que certaines affirmations deviennent rapidement des vérités incontestées. Comme nous savons que Ramón n’était pas le fiancé d’Adela, nous savons que le Gitan venait voir une autre femme qu’Adela. Mais le Gitan ayant été désigné coupable par la rumeur, Ramón est désigné pour laver son honneur en tuant à son tour le Gitan. Nous assistons à un engrenage fatal de rumeurs qui fait que le drame de la mort d’Adela ne peut qu’être suivi d’un autre drame avec la mort de celui que la vindicte populaire désigne comme l’assassin. Ainsi, Guillermo Arriaga aurait pu intituler son roman Chronique d’une mort annoncée mais… le titre était déjà pris.
Avec ses multiples composantes, l’intrigue progresse par chapitres relativement courts (16 au total, chacun étant lui-même subdivisé en sous-chapitres). L’auteur fait bien sentir l’ambiance générale dans ce village où les nouvelles se répandent particulièrement vite et où les rumeurs se substituent si facilement aux informations réelles. Il faut dire que l’enquête est menée par Justino Téllez, le délégué communal de Loma Grande qui ne brille ni par sa diligence ni par sa rigueur. Bref, puisque la population réclame un coupable, il laisse la rumeur répandre le nom qui s’accorde avec les témoignages. Peu importe s’il sait que tout cela ne colle pas.
Ce roman prend aux tripes, mais il laisse quelques impressions contradictoires. Ainsi l’illustration de couverture présente une photographie qui date de 1905, alors qu’on finit par acquérir la certitude que l’action se déroule à l’époque où l’auteur écrit (1994). L’auteur laisserait-il entendre que depuis le début du XXe siècle, fondamentalement, rien n’a changé dans le Mexique profond ? A noter au passage que Guillermo Arriaga n’est pas un inconnu, puisqu’outre son activité de romancier, il a collaboré à des scenarii du cinéaste Alejandro González Iñarritu ainsi qu’à celui du film Trois enterrements (Tommy Lee Jones – 2005).
La vraie déception en refermant ce roman peu épais (168 pages) c’est que l’auteur laisse planer le doute sur l’identité de l’assassin ainsi que sur sa motivation.
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Créée
le 24 août 2025
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