Ça partait mal quand j'ai lu, relu sa préface et ses toutes premières pages, au moins avec 4 ou 6 tentatives : les "je supprimerais tout" me faisaient l'effet d'une complaisance nauséabonde dans le meurtre des "Grands classiques" (bien propres, ceux-là) avec ses points de suspensions et d'exclamations à la pelle. Ça partait mal, ce voyage qui ne me paraissait rien moins qu'un crâne pied-de-nez à la grande littérature qui le précède. (EH BIM, Balzac, dans ta slfjhmsdjfejhblejhr)
Et puis, en y entrant tout-à-fait dans sa nuit, dans ses nuits qui s'en vont éteindre toujours quelque part, "par-ci, par-là", un lumignon d'espoir ou d'audace humaine, elles ont fini par m'avoir, et très vite, dans le long et scabreux pèlerinage, épluché de sa croyance toujours plus à mesure. Faut dire que le talent de sa plume rattrape vite le premier et mauvais effet : dès la première guerre, ses élans incisifs, bruts, géniaux faisaient transparaître ce que Céline a bien vu : ces canons remplis de mensonges, les valeurs rances, capitonnées des "costumes du passé" qui ne parviennent pas à lui masquer les caillots de moisi. Il n'effleure pas la réalité (il s'en méfie trop), il l'arrache et fait découvrir ses vers prolifiques, et la vérité puceuse, essentiellement organiques.
À ce constat, il ne donne néanmoins pas de réponse. À ce voyage, il retire l'attente de la destination : c'est une nuit qui ne finit pas, toujours martelée, qui existe de conserve (ah ! ce "Cassoulet à la Bordelaise" !) avec l'écriture. Aussi, poser la question à Céline lui-même, qu'en fera-t-il ?
"Ou l'artiste s'accommodera des ténèbres, ou il verra l'aurore."
C'est l'histoire qui nous répond.
À relire !