Ce livre est un marathon.
Les 632 pages sont comparables aux 42,195km de cette épreuve.
Tout comme pour un marathon, on ressent de l'appréhension avant de prendre le départ, pas d'appétit, les jambes coupés, le coeur battant, le souffle court.
Puis l'on s'élance, l'inertie de la foule nous fait piétiner, on bute sur des chevilles comme on bute sur des mots, les muscles sont froids, tendus, douloureux tout comme nos yeux sur l'encre de ces pages jaunies.
On adopte ensuite un rythme qui nous convient, on suit un groupe, ils seront nos compagnons durant ce voyage au bout du bitume, tout comme Ferdinand et Léon le sont pour notre voyage au bout de la nuit.
Parfois c'est difficile, on s'accroche mais tout comme le spectateur qui t'encourage le long du parcours et parvient à te galvaniser, certaines phrases te procurent le même effet. Tu veux aller plus loin, ne pas t'arrêter, ne pas marcher, tourner ces pages encore et encore.
La guerre avait brûlé les uns, réchauffé les autres, comme le feu torture ou conforte, selon qu'on est placé dedans ou devant.
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En même temps ils me montraient de laideurs en laideurs tout ce qu'ils dissimulaient dans la boutique de leur âme et ne le montrait à personne qu'à moi. On ne payera jamais ces hideurs assez cher. Seulement elles vous filent entre les doigts comme des serpents glaireux.
Tout comme le parcours le récit nous fait voyager, on découvre l'Afrique dans toute sa noirceur, l'Amérique dans toute sa démesure et les hommes dans leur complexe simplicité.
Les ravitaillements ne manquent pas le long du parcours, tout comme certaines perles qui égayent la lecture et nous redonnent de l'énergie. Céline parvient à mettre les mots justes sur des situations vécues, des sentiments rencontrés, des interrogations mais que l'on a jamais réussi à exprimer et à extérioriser.
Les souvenirs eux-même ont leur jeunesse... Ils tournent dès qu'on les laisse moisir en dégoûtant fantômes tout suintant d'égoïsme, de vanité et de mensonges.
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Et puis je l'imaginais, pour m'amuser, tout nu devant son autel... C'est ainsi qu'il faut s'habituer à transposer dès le premier abord les hommes qui viennent vous rendre visite, on les comprend bien plus vite après ça, on discerne tout de suite dans n'importe quel personnage sa réalité d'énorme et d'avide asticot.
On entame les derniers kilomètres, pour certains les meilleurs, pour d'autres, les pires.
J'étais vraiment à bout de souffle pour ma part, les crampes prêtes à se déclencher à chaque foulée, des renvois permanents, un mal de tête atroce.
J'ai du m'accrocher pour le terminer, une fois la dernière page tournée (tout comme le franchissement de la ligne), une immense satisfaction et une certaine fierté.
Plus qu'à aller boire une bière avec les autres participants et discuter de la performance.
Plus qu'à aller sur SC et discuter du bouquin.
Et du coup, quand est-ce qu'on recommence?